Page:Janin - L’Âne mort, 1842.djvu/111

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et qui peut redevenir, si vous le voulez, une espérance !

D’abord, vous apercevez, au milieu du secrétaire, une masse assez considérable de papiers déjà jaunis : ce sont des vers de jeune homme, des plans de drames, des livres commencés, un avortement complet, un édifice qui n’a été élevé qu’à moitié, et qui tombe déjà en ruine. Pas une de ces pensées qui m’agitaient n’avait été mise en lumière, pas un de ces rêves n’avait trouvé d’échos au dehors, aucune mémoire ne s’en était occupée. Dans les arts de l’imagination, penser n’est pas le plus difficile ; le plus difficile, c’est de produire cette pensée, c’est de la jeter au dehors assez complète pour qu’elle frappe, assez parée pour qu’elle séduise. Jeune et fort comme je l’étais, j’avais manqué de courage ; comme une soubrette malhabile ou paresseuse, j’avais laissé ma déesse à demi nue, non pas dans cette nudité décente et gracieuse qui est le comble de l’art, mais dans cette nudité maladroite qui offense : un bas mal tiré et retenu par une jarretière usée, un corset dont on voit tout le travail, un jupon disgracieux, tout le dessous d’une parure mal composée : voilà ce qui occupe mon premier tiroir.

Le second tiroir est presque vide ; il contient mes