Page:Janin - L’Âne mort, 1842.djvu/151

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pas imaginé que la potence pût devenir un agréable sujet d’amusants souvenirs ; jamais je n’avais vu colorer la mort de pareilles couleurs ; au contraire, parmi ceux qui ont exploité cette mine féconde en sensations, c’est à qui rembrunira le tableau, à qui ensanglantera la scène, comme si dans notre vie sociale la peine de mort n’était pas une action vulgaire, une espèce d’amende à payer dont on a toujours le montant sur les épaules, rien de plus. Or, telle était la loyauté de notre bandit ; il savait que la potence était la contre-partie de sa profession, il savait que la société italienne lui avait dit tacitement : — Je te permets de piller, de voler et même de tuer des Anglais et des Autrichiens, à condition que, si tu nous forces à te prendre, tu seras pendu ; cette condition, il l’avait acceptée, et il avait dans l’âme trop de justice pour s’en plaindre. Je voulus donc savoir ce qu’il était devenu depuis qu’il avait été pendu ; à ma prière, il continua son récit :

— Je me souviens fort bien de la moindre sensation, me dit-il, et ce serait à recommencer dans une heure, que je ne m’en inquiéterais pas plus que de cela. Dès que j’eus la corde au cou et que je fus tombé dans le vide, je sentis d’abord un assez grand mal à la gorge, puis