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Page:Janin - L’Âne mort, 1842.djvu/154

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honnête parmi vous, je me suis procuré un habit propre et un chapeau neuf, ce qui est un grand point.

— Il vous faudrait encore un métier, et j’ai bien peur que vous n’en ayez pas.

— Voilà ce qu’on me dit partout, seigneur ; et cependant j’ai beau chercher, je n’ai jamais vu qu’un métier menât à quelque chose parmi vous.

— Pensiez-vous être plus heureux en Italie ?

— La campagne de Naples, bonne mère, produit chaque matin assez de champignons pour nourrir toute une ville : chez vous, tout se paie, jusqu’à vos champignons qui sont mortels.

— Pensez-vous donc que le métier de lazzarone soit un métier d’honnête homme ?

— Il n’y en a pas de plus loyal ; on n’est ni maître ni valet ; on ne dépend que de soi ; on ne travaille que quand il y a urgence, et il n’y a jamais urgence, tant que le soleil reluit là-haut ; enfin on peut aller à Rome et faire le tour de Saint-Pierre à genoux, ce qui vaut deux cents indulgences : voilà ce que c’est que d’être lazzarone.

— En ce cas-là, pourquoi donc ne vous êtes-vous pas fait recevoir lazzarone, je vous prie ?

— J’y avais bien songé, excellence, me dit-il ; Maria