Aller au contenu

Page:Janin - L’Âne mort, 1842.djvu/169

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

j’étais peintre, je peindrais le calme et le bonheur. À mon sens, rien n’exprime le repos comme un heureux enfant de Mahomet couché sur un tapis de Perse, sans peine, sans désirs, sans rêve, et dans cet heureux sommeil de l’Orient qui ne vous force même pas à fermer les yeux, comme si c’était déjà une trop grande violence pour un mortel.

Ainsi parla le Turc : J’ai remarqué souvent qu’une histoire intéressante et bien racontée disposait merveilleusement les esprits et changeait souvent la face d’une conversation, de l’ennui au plaisir. Une fois entré dans un salon, que voulez-vous qu’on fasse, sinon se glorifier soi-même et décrier les absents ? Ainsi donc, après ce premier récit, la soirée prit une face nouvelle ; chacun se rapprocha de son voisin, et, bien plus, la maîtresse du logis, étouffant la voix d’une économie parcimonieuse qui lui reprochait d’ouvrir son bûcher avant que l’almanach n’eût annoncé positivement l’hiver, parla de nous faire un peu de feu. La proposition fut acceptée avec mille bravos unanimes : en un clin d’œil la cheminée fut débarrassée de son rempart de papier gris ; le sarment embrasé fit reluire les chenets de cuivre, en même temps que tous les visages, égayés et ranimés