Page:Janin - L’Âne mort, 1842.djvu/239

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une scène, d’assister à l’entière expiation de cette vie si malheureusement employée. La victime n’intéressait plus que moi dans le monde ; je l’aimais, je voulus la revoir encore et ne la plus quitter. Sylvio, qui me prenait en pitié depuis si longtemps, ne m’abandonna pas dans cette dernière extrémité : grâce à ses liaisons avec quelques hommes puissants, il m’introduisit dans cette vaste prison, dont les plus heureuses habitantes sont condamnées aux galères, véritable supplice bâtard, aussi horrible, quoique moins en évidence, que les tortures des bagnes de Brest et de Toulon. Dans ce lieu abominable qu’on pourrait appeler l’enfer, si on ne craignait pas de calomnier l’enfer, j’entendis des gémissements et des cris de joie, des blasphèmes et des prières ; je vis de la rage et des larmes ; mais tous ces faits généraux m’intéressaient fort peu en ce moment. Parmi toutes ces femmes perdues, je n’en voulais qu’à une femme, à une seule, — la femme qui allait mourir. Cette tête qu’on devait couper avait été jetée toute vivante dans cette fosse commune de la guillotine ou du bagne, qu’on appelle la Salpêtrière. Dans quel cachot était tombée la condamnée ? Il fallait toute ma persévérance et tout mon amour pour le découvrir. Le cachot où elle était renfermée, à triple serrure, était enfoncé profondément