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Page:Janin - L’Âne mort, 1842.djvu/278

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comment j’avais passé la nuit, et proposa que je me joignisse à lui pour prier. Je me ramassai sur moi-même, je restai assis sur le bord du lit. Mes dents claquaient, mes genoux s’entre-choquaient en dépit de moi. Il ne faisait pas encore grand jour ; et comme la porte du cachot restait ouverte, je pouvais voir au delà la petite cour pavée ; l’air était épais et sombre, et il tombait une pluie lente, mais continue. « Il est sept heures et demie passées, Roger ! » dit le gardien de la prison. Je rassemblai mes forces pour demander qu’on me laissât seul jusqu’au dernier moment. J’avais trente minutes à vivre !

« J’essayai de faire une autre observation quand le gardien fut prêt à quitter le cachot ; mais cette fois je ne pus pas faire sortir les mots que je voulais dire ; le souffle me manqua ; ma langue s’attacha à mon palais ; j’avais perdu, non pas la parole, mais la faculté de parler ; je fis deux violents efforts pour retrouver le son : vains efforts ! je ne pouvais pas prononcer. Lorsqu’ils furent partis, je restai à la même place sur le lit. J’étais engourdi par le froid, probablement aussi par le sommeil et par le grand air inaccoutumé qui avait pénétré dans ma prison ; je demeurai roulé pour ainsi dire sur moi-même, afin de me tenir plus chaudement, les bras