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Page:Janin - L’Âne mort, 1842.djvu/83

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sofa et tenait toujours cette fille ingrate sous son regard.

Quand tout fut préparé, on plaça le cadavre du noyé sur la table, on rapprocha du tronc le membre qui lui manquait, et l’art se mit à opérer.

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Le cadavre s’agita, les deux mâchoires s’entre-choquèrent, la cuisse brisée retomba lourdement sur le parquet ; à ce choc mou et flasque, le piano rendit un son plaintif, et tout fut dit !

Le jeune Anglais était hors de lui. D’abord, en retrouvant cette frêle et horrible apparence de la vie, il avait poussé un cri de joie ; mais, hélas ! ce dernier bond de la pourriture humaine avait à peine duré une seconde. — Il se précipita sur le cadavre insulté ; il prit sa main, cette main était froide ; il se frotta les yeux comme s’il était tourmenté par un mauvais songe, et il voulut fuir. Je le suivais, je le soutenais. Déjà nous étions à la porte du salon, lorsque se retournant avec un regard menaçant : — Monsieur, dit-il au maître du logis, je reviendrai demain à huit heures ;