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Page:Janin - La Bretagne, 1844.djvu/44

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peine César a-t-il quitté les Gaules, que Vercingetorix appelle à lui tous ces peuples divers. Ceux de l’Auvergne, du Poitou, du Querci, de la Touraine, de la Sarthe, de l’Eure, du Limousin, du Berri, de l’Agenois, du Dauphiné, du Vivarais, et surtout les soldats de l’Anjou et de toutes les villes qui bordent l’Océan. Les Gaules entières répondent à l’appel du héros ; à ce bruit d’armes, César arrive ; il comprend que cette fois encore la puissance romaine, dans les Gaules, est remise en question. À l’approche des Romains, les Gaulois redoublent d’ardeur, ils se pressent près de leur chef, qu’ils appellent le grand général : sumanum ducem. Ils défendent les villes assiégées, ils attaquent les Romains dans leurs remparts. Vercingetorix est partout, combattant par l’épée et par la parole, car Jules César, qui se connaissait en éloquence, n’a pas dédaigné de rapporter dans son livre les discours du jeune Gaulois. Les guerres romaines n’ont rien de plus grand que cette guerre. César s’y montre dans toute sa force et dans toute son intelligence, et Vercingetorix est pour le moins à la taille de César. Parmi tous ces peuples qui se distinguent, nous retrouvons nos amis du Vexin, de la Normandie, de Rennes, d’Avranches, et les Osismiens, et les Curiosolites, et les Venètes. Jamais les Gaulois n’avaient été plus près de la liberté, jamais ils n’avaient fait de plus grands sacrifices pour redevenir les maîtres. Mais, hélas ! c’était le dernier effort de l’indépendance nationale ; la fortune était pour César, les Gaulois sont battus sans retour. Leur chef illustre, ce vaillant homme d’un si ardent génie, pris vivant, est conduit à Rome, où il est égorgé dans le cachot encore tout rempli du sang de Jugurtha. Grande douleur dans les Gaules, profonde misère, dernier coup porté à cette confédération puissante qui avait enfanté tant de héros.

Voilà, à coup sûr, cette nation gallo-bretonne dont les commencements sont dignes d’un grand peuple. À lire cette histoire, non pas dans les chroniques écrites au hasard par des plumes ignorantes, mais écrite par le plus grand historien de Rome, celui-là qui était un aussi habile écrivain qu’un habile capitaine, combien nos ancêtres nous paraissent grands, forts, et dignes de nos louanges, dignes de nos respects ! Ils commencent, tout simplement, par être des héros, pendant que les Romains et les Normands ont commencé par être des voleurs et des pirates. À peine arrivés, ils se précipitent sur les vieilles phalanges de la Rome guerrière et souveraine, leur courage ne recule devant rien et devant personne ; ils ont besoin de bruit,