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Page:Janin - La Bretagne, 1844.djvu/662

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tagne, s’il n’a pas les élégances et s’il ne connaît pas le bien-être de plusieurs parties de la France, il a le grand mérite d’aimer sa terre, de ne la point quitter, d’y vivre de son travail et d’y mourir en paix.

Mais continuons notre voyage à travers cette Domnonée, l’ancien domaine de ces comtes de Rennes qui ont donné des rois à la Bretagne. Josselin, n’est plus qu’un gros bourg ; — Pontivy vient ensuite. — Non loin de Vannes, n’est-ce pas Auray qui se montre à nous sous son aspect tout breton ? — Auray, c’est la forte citadelle qui a joué ce grand rôle dans notre histoire. Ce nom-là vous rappelle la terrible bataille où mourut Charles de Blois, où Duguesclin fut prisonnier, où Clisson perdit un œil. Son port est sûr, ses fabriques sont nombreuses ; elle vit de sa pêche, de son industrie, et enfin elle est célèbre dans toute la Bretagne par le fameux pèlerinage de Sainte-Anne. — Notre-Dame-d’Auray, c’est la chapelle élevé à une lieue de la ville, dans les landes de Plunéret, sur l’emplacement même où fut trouvée une image de la sainte. C’est le lieu sacré de la Bretagne, c’est la chapelle des grands miracles, c’est le saint lieu de charité et d’espérance. — Notre-Dame-d’Auray, priez-pour nous ! Chaque année, plus de cent mille chrétiens accourent, de toutes les parties de la province ; pour se prosterner à Notre-Dame-d’Auray. — Il en vient du pays de Léon, douces vallées, frais sentiers de verdure, éblouissantes campagnes, la terre bénie des églises, des chapelles, des calvaires placés sur le bord des sentiers. — Vous reconnaissez le paysan de Léon à sa piété profonde, à son regard sérieux, à son pas solennel. Le pèlerinage l’appelle, il part, le chapelet à la main, et déjà son voyage est une prière. Beau voyage d’un chrétien ! Les cloches sonnent sur son passage, les oiseaux chantent leurs cantiques, le prêtre le bénit quand il passe, l’église a pour lui un asile et des prières ! L’habit du Léonais est austère : l’homme et la femme sont vêtus de noir. — Le pèlerinage d’Auray est la grande fête des croyants de toute la Bretagne. Les pèlerins y viennent du riche pays de Léon, des fraîches vallées de Goëro, ainsi que des plaines arides de la Cornouailles. L’homme de la Cornouailles est poëte, improvisateur ; il marche où l’imagination l’appelle ; il s’en va à Notre-Dame-d’Auray, tout paré de sa veste brodée, menant sur son cheval sa jeune femme, la tête ornée de dentelles et de ses longs cheveux, sa plus belle parure. — Il en vient du pays de Tréguier, et ceux-là foulent aux pieds la violette et la fleur de lait. Ils marchent, les heureux, entre deux haies d’aubé-