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À BRINDES.

et l’esprit aussi, je me suis dit : — Si je voyageais ? Moi voyager ! Voyez le grand mot pour moi ! — Voyager ! n’être plus ici, être là-bas ! entrer dans des villes nouvelles, si nouvelles que je suis sûr de n’y pas trouver un ennemi ; s’abandonner au nonchalant mouvement de la chaise de poste, qu’un Anglais appelle le paradis sur la terre ; et puis ne rien faire, ne rien entendre, ne rien juger de ce qui se fait, de ce qu’on voit tous les jours ! — Et puis avoir à soi pour soi tout seul ses rêves, ses méditations, ses pensées, ses fantômes tristes ou joyeux, ses diables bleus ou couleur de rose ! les posséder en toute propriété ces changeantes émotions du cœur, et ne pas les porter toutes chaudes encore et toutes palpitantes à l’imprimeur, qui vous rend tout cela pâle et glacé ! aller vite, aller au hasard, courir comme un gentilhomme en vacances… que dis-je ? courir comme un Anglais, mais comme un Anglais d’esprit et de bonne humeur ! s’entendre appeler Milord par la