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l’aveugle.

pas du bal ni des filles à marier au bal ! Le bal est un théâtre pour elles. Au bal elles s’étalent à plaisir et se montrent dans leur beau une heure, pour être maussades le reste de leur vie. Ne me parle pas du bal ! Quant à chercher une femme, je n’ai pas besoin de mes yeux pour la trouver : quand je serai aveugle, je la verrai à sa main, à son pas léger, à sa voix surtout, à son visage s’il rougit sur mes lèvres, à son cœur s’il bat contre mon cœur, à son haleine, au parfum virginal de ses vêtements. À ces signes je trouverai ma maîtresse ; je n’ai pas besoin d’y voir pour être encore le plus heureux des hommes, si je dois être encore heureux.

Puis il reprit sur un ton moins sévère :

— Si je deviens aveugle, mon ami, je te conseille de ne pas trop me plaindre. À le bien voir, il n’y a plus rien de beau dans le vieux monde ; le monde est laid, vieux et monotone. Que m’importe la vue, si j’ai la paix et le calme chez moi, la chaleur du so-