Page:Jannet - Le capital, la spéculation et la finance au XIXe siècle, 1892.djvu/155

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permanents dans le pays : telles sont les précautions auxquelles les diverses législations ont eu jadis recours.

Même le contrat de constitution de rente, quoique beaucoup plus favorable au débiteur, nous l’avons expliqué (chap. iii, § 4), n’a pas laissé au xve et au xvie siècle, de charger lourdement la propriété foncière par suite de l’écart entre le taux des rentes et la productivité réelle des capitaux empruntés sous cette forme. Dans beaucoup de localités, les terres et les maisons succombaient sous le faix des rentes et l’on pouvait, avec beaucoup plus de raison qu’aujourd’hui, se plaindre de l’endettement hypothécaire[1]. Mais la grande baisse des métaux précieux, résultat de l’exploitation des mines américaines, vint heureusement à la fois déprécier dans la proportion de 600 p. 100 les rentes constituées en argent et en même temps faire baisser du 10 ou du 8 p. 100 au 6 ou au 5 le taux des nouvelles constitutions de rente.

Les gouvernements et même la Papauté intervinrent pour faire profiter de cette révolution monétaire les débiteurs de rentes en ordonnant :— 1° que les rentes anciennes pourraient être rachetées, même celles qui étaient stipulées en denrées ; — 2° eu réduisant les rentes, qui n’avaient pas été rachetées, au taux nouveau[2]. Le sort des propriétaires de rentes, des anciens capitalistes, fut fort dur à cause de la soudaineté de cette révolution. Depuis, dans le cours du xixe siècle, le même phénomène s’est produit, mais avec plus de lenteur, faisant sentir son action favorable et ramenant l’intérêt de l’argent à un taux qui rend le recours au crédit très avantageux pour les entreprises manufacturières et commerciales et pour les opérations de Banque.

VIII. — Il en est autrement pour l’agriculture. L’organisation

  1. V. pour les villes d’Alsace, Hanauer, Etudes économiques sur l’Alsace ancienne et moderne (Colmar, 1867).
  2. Les classes privilégiées dans plusieurs localités empêchèrent l’effet utile de ces mesures, en faisant passer des rentes constituées pour des rentes retenues ou emphytéotiques. V. entre autres la Dissertation sur les rentes en Dauphiné de Guy Allard, dans le tome I de la Bibliothèque du Dauphiné de Gariel. La même chose s’était produite en Nivernais. V. Guy Coquille, Mémoires de ce qui est à faire pour le bien du Nivernais. Œuvres complètes, t. I, p. 318.