Page:Jaurès - Action socialiste I.djvu/136

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dans la biographie que le P. Didon a tentée ; et l’on sort de son livre en se disant : il est bien vrai pourtant que de la vie du Christ on ne sait presque rien. — Et puis, le P. Didon, pour concilier les contradictions des différents Évangiles, — dont les uns, les plus rapprochés en date de Jésus, ne montrent guère en lui qu’un prophète, tandis que le dernier surtout en fait un Dieu, — a une explication bien audacieuse : « Il faut se défaire, » dit-il, « de ce préjugé que les Évangiles sont des sténographies » ; les paroles du Christ n’y sont rapportées ni textuellement, ni complètement, et chacun en a recueilli ce qui répondait le mieux à ses préoccupations personnelles.

Encore une fois, si l’on attachait à quoi que ce soit aujourd’hui une importance quelconque, et si le calme de l’esprit public n’avait pas pénétré les controverses religieuses elles-mêmes, il y aurait eu dans le monde catholique une petite tempête. Mais on n’a pas l’air de s’occuper de tout cela. Et ceux qui se félicitent de la tranquillité qu’ils ont ramenée dans les esprits ne savent pas à quel point ils doivent se congratuler. Dans la société religieuse connue dans la société laïque, il n’y a plus qu’indifférence et somnolence. La vie n’est guère relevée tous les jours que par une partie de cartes, et la seule différence entre les laïques et le clergé, c’est que les laïques jouent à la manille et que les curés de campagne jouent encore à l’écarté.