Page:Jaurès - Action socialiste I.djvu/180

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à s’incliner, et dans le récit de la Genèse, dont elle voulait imposer aux hommes l’acceptation littérale, elle ne voit plus qu’un tableau symbolique des diverses époques de la nature se développant selon un plan divin. Mais ici encore, qui a fait la part du symbole et de la réalité, dans les Écritures mêmes ? La science indépendante du dogme.

Enfin, et j’appelle sur ce fait l’attention des croyants aveugles qui nous attaquent si volontiers, l’Église, depuis un siècle, a condamné, comme monstrueuse et impie, la doctrine de l’évolution qui prétend que les espèces vivantes sont sorties, par degré, les unes des autres, et qu’ainsi l’humanité, elle-même, procède de l’animalité. M. Dupanloup refusait même de siéger à l’Académie à côté de Littré, sous prétexte que celui-ci ne répudiait pas la grande hypothèse de Lamarck, de Darwin et de Spencer. Or, à mesure que cette hypothèse se confirme et rallie les suffrages du monde savant, l’Église commence à s’en rapprocher. Je sais que des chrétiens convaincus l’adoptent sans scrupules, et M. de Vogüé, l’hôte chéri du pape, indiquait, il y a deux ans, dans son livre sur l’Exposition, que l’Église pourrait accepter sans trouble la doctrine évolutionniste. Et, en effet, elle n’exclut l’action divine que si on entend celle-ci d’une façon beaucoup trop grossière et matérielle. On peut affirmer que, sous peu, l’Église, dans son ensemble, sera évolutionniste.