Page:Jaurès - Action socialiste I.djvu/239

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conception de justice humaine à réaliser, devenir la proie de tous les mysticismes flottants et dissolvants par lesquels M. de Vogüé et bien d’autres essaient de les ramener, sous des formes nouvelles, au dogme primitif ? Non, vous ne le pourrez pas, et il ne leur restera d’autre élément éducatif, d’autre idéal humain que la justice sociale à réaliser.

Et vous n’avez pas, monsieur le ministre, permettez-moi de vous le dire, répondu sur ce point à la difficulté précise que je vous signalais. Vous avez obligé l’Université elle-même à entrer dans cette étude du problème social, d’abord par la substitution de l’enseignement moderne, dans une large mesure, à l’enseignement classique. Oui, l’enseignement classique était la base de l’éducation dans nos lycées, et comme l’antiquité ignorait, malgré le fond d’esclavage sur lequel elle reposait, ce que nous appelons le problème social, parce que l’esclave avait des révoltes, mais n’avait pas de doctrine, les poètes d’alors, au lieu de s’imprégner de toutes les émotions de la vie dans les sociétés, vivaient dans la pure contemplation des formes esthétiques. Alors, oui, tant que la littérature ancienne était la seule base de l’éducation universitaire, vous pouviez exorciser de vos écoles, vous pouviez chasser de vos lycées les préoccupations du problème social ; mais depuis que vous avez modernisé