Page:Jaurès - Action socialiste I.djvu/352

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précédé d’une réparation. Il ne s’agira plus entre les deux peuples d’une misérable querelle d’amour-propre : nous avons eu nos victoires, comme ils ont eu les leurs ; et ceux qui, pour humilier les succès de M. de Moltke, publient dans les feuilles allemandes les triomphes de Napoléon, ne sont pas ceux contre lesquels nous avons une revanche à prendre. Le jour où ces deux démocraties également puissantes, également civilisées, également éprises d’idéal humain, auront vu qu’en se donnant la main elles peuvent consacrer deux milliards tous les ans à l’amélioration du sort de tous, l’œuvre inique de M. de Bismarck aura croulé.

Pour préparer cet accord possible, pour hâter cet avenir entrevu, notre devoir est d’abord d’affirmer notre foi dans la démocratie allemande et dans le triomphe pacifique de la justice, ensuite de travailler avec passion au développement de la démocratie française. Travailler pour la démocratie, c’est vraiment, au sens le plus élevé du mot, travailler pour la patrie. Le désarmement simultané que le comte de Paris indique dans son manifeste est une chimère criminelle : car le comte de Paris ne peut espérer, au moment où il étoufferait la démocratie en France, le triomphe de la démocratie allemande. Il n’entend donc pas désarmer devant la démocratie allemande ayant réparé l’injustice de M. de Bismarck, mais devant les continuateurs de M. de Bismarck continuant son injustice.