Page:Jaurès - Action socialiste I.djvu/396

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de l’Europe, une force incomparable et invincible. — Et si la République française allait jusqu’au bout de sa mission et de son idée, si elle ne reculait point devant elle-même, comme effrayée par la grandeur de son ombre, si elle savait faire surgir de la liberté politique l’égalité sociale, si elle affranchissait tous les travailleurs, ouvriers et paysans, de la dîme capitaliste, si elle appelait enfin tous les spoliés, tous les opprimés, tous les serfs à la propriété souveraine, et si elle remettait le puissant outillage des armées modernes à un peuple réellement libre pour la première fois, animé à défendre contre l’univers la joie de vivre enfin révélée, quelle est la coalition triple ou quadruple qui pourrait avoir même la tentation de toucher à un aussi prodigieux ressort ?

Au point de vue précis des relations extérieures et diplomatiques, l’histoire de la Révolution nous montre que l’on peut concilier la fierté avec la sagesse et l’habileté. La Révolution a su tout à la fois affirmer très haut ses principes, et diviser ses adversaires en exploitant leurs défiances réciproques et leurs antagonismes géographiques ou historiques. Elle a déclaré à plusieurs reprises, quand elle eut échappé à l’imprévoyante direction des Girondins, que la République française pouvait conclure avec tel ou tel roi des arrangements particuliers, mais cela, à une condition absolue : c’est que la France suivrait jusqu’au bout, à l’intérieur, la