Page:Jaurès - Action socialiste I.djvu/435

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armée de réserve, dont on parle pour l’oublier soudain, n’est-elle pas mêlée incessamment à toute la vie du pays, à sa vie nationale, à sa vie politique ? Et je ne suppose pas que, malgré quelques exemples, vous ayez la prétention d’imposer une orthodoxie politique et sociale à tous vos officiers et à tous vos sous-officiers de réserve ? Mais, dans l’armée active, dites-vous, il n’y a pas de politique ! — Ah ! c’est la tactique profonde de tous les ennemis de la République et de la démocratie, depuis deux ans, de faire de la politique en ayant l’air de faire autre chose. Le clergé, lui, ne fait plus de politique : il est rallié ; il s’occupe seulement de religion ; mais, sous prétexte de défendre les seuls intérêts religieux, il prépare des remaniements législatifs et parlementaires qui compromettraient la République elle-même. Et il en est ainsi de certaines coteries militaires puissantes. Ah ! elles ne font pas de politique ouvertement, c’est vrai ; mais il est impossible de toucher aux conceptions d’ordre militaire, qui sont l’expression, le résumé, la condensation de toute une politique ; il est impossible d’introduire, de proposer ou de faire proposer des conceptions militaires quelconques, sans soutenir par là même une doctrine et une politique.

On a dit l’autre jour — M. Raiberti rappelait le mot — : « L’armée est une grande muette. » Il y a, messieurs, des coteries militaires puissantes qui parlent