Page:Jaurès - Action socialiste I.djvu/505

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applaudissements à l’extrême gauche. Mais, au-dessus des déclarations, il y a les leçons de choses que le Sultan, à l’heure actuelle, reçoit de l’Europe. Lorsque le Sultan voit que, pendant trois années, il a pu, grâce au sommeil complaisant de l’Europe, conduire impuni des massacres qui n’ont peut-être pas de précédents dans les derniers siècles de l’histoire humaine, lorsqu’il voit l’Europe, se levant dans le premier sursaut de ce réveil tardif, au lieu de se tourner vers les victimes du Sultan pour guérir leurs blessures… (Bruit au centre), au lieu de se tourner vers les populations opprimées, pour les aider à conquérir leur indépendance, se faire d’abord, pour première démarche, pour première politique, la servante de ses intérêts à lui, il se dit qu’il tient l’Europe dans ses mains, qu’il peut, à son gré, jouer d’elle. (Applaudissements à l’extrême gauche.) Et qu’a-t-il vu depuis trois semaines ? Quel spectacle de sa propre force, quelle glorification de sa propre impunité et de son propre crime allez-vous lui donner demain ? Il y avait eu des populations arméniennes résignées : pour celles-là l’oubli. Il y a un petit peuple crétois qui se soulève, et l’Europe alors vient au secours du Sultan, pour monter la garde autour de l’île de Crète et pour écraser ces populations opprimées. Comment voulez-vous que demain, lorsque, sur les conseils de M. Denys Cochin, vous irez proposer au Sultan des réformes, celui-ci prenne votre langage