Page:Jaurès - Action socialiste I.djvu/529

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qui et de quoi veut-on partir en guerre contre l’Angleterre ? Est-ce pour arracher l’Inde à la meurtrière exploitation étrangère et pour la rendre à elle-même ? Est-ce pour appeler à la liberté et à la vie la population égyptienne et pour organiser en Égypte un système de garanties internationales ? Non. Ce qu’on veut arracher aux Anglais, c’est pour le livrer au caporalisme prussien et au tsarisme russe.

L’Angleterre est détestée à Saint-Pétersbourg et à Berlin non seulement parce qu’elle occupe une large part du monde et ferme toutes les routes aux autres peuples, mais parce qu’elle est condamnée, même sous les ministères conservateurs, à rester un foyer de libéralisme, un asile pour les proscrits. La France, la France d’Hanotaux et de Méline, Nicolas et Guillaume savent qu’on en fait ce qu’on veut : elle baise la main sanglante d’Abd-ul-Hamid ; elle paralyse la résistance de la Grèce ; elle livre les finances grecques aux banquiers berlinois ; elle expulse les libéraux espagnols coupables de dénoncer les tortures de Montjuich ; elle proscrit à nouveau les proscrits cubains ; elle livrera demain au Sultan, s’il insiste, la jeune Turquie ; elle a, sous prétexte d’anarchisme, toléré la loi la plus tyrannique qui soit au monde ; elle est prête, contre les socialistes et le peuple, à toutes les violences de police : oui, la France gouvernementale n’est plus qu’une nation d’antichambre, et les empe-