Page:Jaurès - Action socialiste I.djvu/551

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nous ravalerait peu à peu au rang de l’Espagne et nous jetterait, affaiblis, aux aventures.

Mais n’y a-t-il point en Angleterre un parti de la guerre ? Il est permis de le craindre. Les chauvins anglais, dont lord Salisbury a été obligé, au banquet même de Guildhall, de modérer les impatiences, sont exaltés par la force de la marine anglaise ; ils savent qu’elle est en ce moment supérieure aux autres marines ; ils se demandent s’il en sera de même dans quelques années ; ils estiment qu’ils auraient intérêt à brusquer les événements avant que la France ait exécuté son nouveau programme naval, et ménagé des points d’appui à ses flottes en Corse et en Tunisie, avant que l’Allemagne ait développé sa marine, et que la Russie ait achevé le chemin de fer transsibérien ; ils pensent qu’ils pourraient ainsi régler à leur avantage toutes les questions litigieuses en Afrique et en Asie. Cette agitation des jingoïstes, des chauvins, serait sans péril si le capitalisme anglais lui-même n’avait point quelque intérêt à la guerre. Il voit avec inquiétude les débouchés commerciaux de l’Angleterre se resserrer. De toutes parts, surgissent de nouvelles activités, de nouvelles ambitions ; l’Afrique, malgré la possession de l’Égypte, est bien loin d’être toute anglaise ; et en Asie, la concurrence croissante de l’Allemagne, l’influence croissante de la Russie sont un péril pour les exportations de l’Angleterre ; aussi le grand capital an-