Page:Jaurès - Action socialiste I.djvu/565

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les partis, l’homme de la paix. Les conservateurs lui reprochaient même, il y a quelques mois, un excès de faiblesse ; ils semblent considérer aujourd’hui qu’il a gardé un sage équilibre, et qu’il a su obtenir pour l’Angleterre des résultats importants en évitant d’envenimer les conflits. C’est l’hommage aussi que lui rendent les libéraux ; l’un d’eux, un des plus considérables, me disait en souriant : « Dans mes prières, si j’en faisais, je demanderais, matin et soir, longue vie pour lord Salisbury. » Il semble donc que dans les régions gouvernementales anglaises il y a bien des forces d’équilibre qui préviendront les aventures ; il y a, même dans le parti impérialiste, un instinct de modération qui empêchera sans doute M. Chamberlain d’être un Crispi anglais.

La nation anglaise subissait depuis quelques années une crise industrielle et une crise d’amour-propre. La concurrence de l’Allemagne, de l’Amérique, du Japon, de l’Inde même a refoulé l’industrie anglaise ; depuis dix ans les exportations annuelles de l’Angleterre ont diminué de plus de 500 millions ; son industrie métallurgique se soutenait péniblement pendant que celle de l’Allemagne montait ; ses exportations de textiles fléchissaient. En même temps, le langage brutal du président Cleveland à propos du Venezuela, les rapides progrès de l’influence russe en Chine, la dépêche presque offensante de l’empereur Guillaume