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HISTOIRE SOCIALISTE

L’instruction publique et la faculté aux juges d’interpeller les témoins sur les circonstances de la plainte et de leurs dépositions ;

La faculté à l’accusé de se choisir tel défenseur qu’il jugera à propos, même de s’en faire assister dans les procédures de l’instruction ;

L’établissement de défenseurs gratuits pour ceux qui ne pourraient s’en procurer ;

Nous désirons que toute sentence ou arrêt contienne le motif de la condamnation et la copie littérale du texte de la loi en vertu de laquelle l’accusé sera condamné, sans que jamais il puisse l’être pour les cas résultants du procès.

L’abolition de la confiscation des biens des condamnés ;

L’inhumation des suppliciés comme celle des autres citoyens, sans faire mention du genre de mort dans l’acte mortuaire ;

L’admission des parents des condamnés à tous emplois civils, militaires et ecclésiastiques. »

Vraiment l’ensemble de ces cahiers de Paris extra-muros est admirable. Non seulement ils formulent avec précision et sobriété les droits de l’homme d’où procède toute Constitution libre ; non seulement ils tracent un plan très net de Constitution ; mais ils semblent prévoir et prévenir, jusque dans les détails, tous les périls qui peuvent menacer la liberté nationale. Ils prévoient la possibilité du coup d’État militaire que tenta en effet la Cour dans les journées qui précédèrent le 14 juillet et ils demandent que la force militaire ne puisse approcher de plus de dix lieues des États généraux. Ils veulent assurer l’inviolabilité de la Nation en la personne de ses représentants inviolables. Ils vont jusqu’à prévoir le discrédit et l’impuissance où des délibérations désordonnées et tumultueuses jetteraient l’assemblée, et ils déterminent d’avance le règlement : c’est en effet la Présidence de quinzaine avec des pouvoirs de police étendus qui sera instituée par l’Assemblée nationale.

Ils organisent si fortement la périodicité des États généraux qu’en fait, implicitement, ils en établissent la permanence ; en interdisant aux États généraux de se continuer par une commission intermédiaire, ils ôtent à la royauté le moyen de transformer cette commission peu à peu asservie en une sorte de représentation nationale fictive et d’éluder ainsi la convocation des États généraux.

Ils dessinent d’un contour très net tout le système administratif de la Révolution qui sera une hiérarchie d’assemblées électives ; et par cette organisation ils arrachent la France à l’action contre-révolutionnaire du pouvoir exécutif royal.

Comprenant bien que la sanction suprême de la Révolution est dans le refus de l’impôt, dans la grève générale de l’impôt, ils proclament que dés maintenant tous les impôts existants sont illégaux, qu’ils ne peuvent être consentis qu’après l’établissement, la promulgation et l’affichage de la Constitu-