Page:Jaurès - Histoire socialiste, I.djvu/295

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
285
HISTOIRE SOCIALISTE

pital ; mais, d’autre part, il dénonce l’iniquité et la violence de ces prétendus droits avec tant de force, que le rachat lui aussi apparaît, logiquement, comme une iniquité.

Sa colère et sa démonstration même dépassent sa conclusion, et comme un gland semé au hasard d’un vent d’orage et d’où bientôt croîtra un chêne, un germe rude d’expropriation totale est enfoncé désormais dans la terre de la Révolution :

« Messieurs, vous eussiez prévenu l’incendie des châteaux, si vous aviez été plus prompts à déclarer que les armes terribles qu’ils contenaient et qui tourmentent le peuple depuis des siècles, allaient être anéanties par le rachat forcé que vous alliez ordonner. Le peuple, impatient d’obtenir justice, s’empressa à détruire ces titres, monuments de la barbarie de nos pères.


marie antoinette.
(D’après une estampe du Musée Carnavalet.)


« Soyons justes, messieurs, qu’on nous apporte ici les titres qui outragent non seulement la pudeur, mais l’humanité même. Qu’on nous apporte ces titres qui humilient l’espèce humaine, en exigeant que les hommes soient attelés à une charrue comme les animaux du labourage. Qu’on nous apporte ces titres qui obligent les hommes à passer les nuits à battre les étangs, pour empêcher les grenouilles de troubler le sommeil de leurs voluptueux seigneurs.

« Qui de vous, messieurs, dans ce siècle de lumière, ne ferait pas un bûcher expiatoire de ces infâmes parchemins et ne porterait pas la flamme pour en faire un sacrifice sur l’autel de la patrie ? »