Page:Jaurès - Histoire socialiste, I.djvu/412

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
402
HISTOIRE SOCIALISTE

au chef-lieu du département et là ils choisissaient le député à l’Assemblée nationale.

Le nombre des députés élus par chaque département était déterminé d’après trois éléments : le territoire, la population, la contribution directe. La Constituante voulait d’abord que tous les départements, même les moins peuplés, même les plus pauvres, eussent un minimum de représentation. Il lui semblait que si une représentation trop faible était accordée aux départements (comme les landes de Bordeaux) où la population était rare et misérable, la sollicitude nationale se détournerait précisément des régions qui en avaient le plus de besoin.

Elle décida donc qu’un tiers des députés serait attribué au territoire : et comme la grandeur territoriale de tous les départements devait être sensiblement la même, chaque département eut droit, de ce chef, à trois députés. Ces trois députés, multipliés par le chiffre des départements, formaient le tiers de l’Assemblée.

Mais il eût été injuste et déraisonnable de ne pas assurer la représentation directe des hommes eux-mêmes et de ne pas proportionner en quelque mesure le nombre des députés au nombre des citoyens actifs de chaque département.

C’est donc en raison de la population que sera réparti le second tiers des députés. Remarquez que répartir les députés en proportion de la population ou en proportion du nombre des citoyens actifs c’est la même chose, car les citoyens actifs forment, en fait, dans tous les départements, un sixième environ de la population totale ; qu’on prenne pour base de la répartition la population ou le nombre des citoyens actifs, le résultat est le même.

Il fut donc convenu que la somme totale de la population de la France serait divisée en autant de parts qu’il y aurait de députés dans le second tiers, c’est-à-dire environ 240. Et chaque département aurait droit, pour ce second tiers, à autant de députés qu’il comprendrait de parts de population.

Il semble que cette représentation du territoire et de la population aurait dû suffire, car comme Target le reconnaît lui-même dans son important discours du 11 novembre 1789, la densité de la population est en général un effet et un signe de la richesse.

Proportionner le nombre des élus (pour une part) à la population c’est donc en quelque façon le proportionner aussi à la richesse générale du département.

Mais la Constituante pensa que la richesse du département, constatée et mesurée par le chiffre des impositions devait entrer dans le calcul du nombre des députés, et elle décida que le troisième tiers des députés serait attribué à la contribution directe. La masse entière de la contribution serait divisée par le nombre des députés de ce troisième tiers, c’est-à-dire environ par 240,