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HISTOIRE SOCIALISTE

et chaque département recevrait, sur ce troisième tiers, autant de députés qu’il paierait de parts de contribution.

Quelques Constituants objectèrent que par là encore on favorisait « l’aristocratie des riches ». Je crois qu’ils se trompaient, car c’est surtout dans les régions où était accumulée la richesse que se trouvaient le plus grand nombre d’ouvriers assez aisés pour payer trois journées de travail et pour être électeurs : ce sont les pays les plus riches qui étaient les foyers les plus ardents de la Révolution, et comme déjà les pays pauvres étaient favorisés grâce au premier tiers de représentation affecté au territoire, le tiers affecté aux impositions ne faisait guère que rétablir l’équilibre.

Je ne serais donc pas surpris qu’en somme le système de la Constituante aboutit à proportionner la représentation à la population tout en réservant un minimum de représentation aux départements les moins peuplés et les moins riches. Tous les députés ainsi nommés l’étaient pour deux ans.

Ainsi c’est un scrutin départemental qui envoyait les députés à l’Assemblée nationale. Mais ce n’était point un scrutin « de liste ». L’assemblée électorale réunie au chef-lieu du département nommait un à un les députés. Le scrutin était donc départemental et individuel.

Mais le département ne formait pas seulement une circonscription électorale pour le choix des législateurs. Il formait une circonscription administrative, et chacun des divers districts (ou arrondissements) entre lesquels le département était divisé formait aussi une circonscription administrative subordonnée.

Il y avait des assemblées administratives de département et des assemblées administratives de district. Celles de département ressemblent un peu à ce que nous appelons aujourd’hui le conseil général, celles de district à ce que nous appelons aujourd’hui le conseil d’arrondissement. Mais la différence entre les institutions administratives de la Constituante et celles d’aujourd’hui était grande. D’abord le mode d’élection n’était point le même. Aujourd’hui, chaque conseiller général est nommé par un canton. D’après la loi du 22 décembre 1789, c’est l’assemblée générale des électeurs réunie au chef-lieu du département qui désigne tous les membres de l’assemblée administrative ; le scrutin, qui aujourd’hui est cantonal, était alors départemental. L’assemblée électorale qui élisait les administrateurs du département était la même que celle qui élisait les députés au Corps législatif.

Après avoir procédé à l’élection des députés, elle procédait à l’élection des administrateurs du département ; puis, quand les électeurs étaient rentrés dans leurs districts, ils formaient au chef-lieu de ce district une assemblée électorale qui choisissait les administrateurs du district. Toutes ces assemblées administratives étaient renouvelables par moitié tous les deux ans. Mais la différence la plus marquée entre le système d’alors et celui d’aujourd’hui, c’est que ces diverses assemblées de département et de district