Page:Jaurès - Histoire socialiste, II.djvu/338

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des régions où il y avait de grandes forêts, en particulier ceux de l’Est, protestèrent avec violence. Ils affirmèrent qu’il faudrait bien du temps avant que les travaux des mines fussent assez poussés pour que le charbon de terre pût remplacer le bois. Ils dirent que les forêts ne pouvaient être exploitées et, par conséquent, vendues par petites parcelles, que seules de puissantes compagnies capitalistes mettraient la main sur le domaine forestier de la nation, que les pauvres seraient privés, par l’égoïsme brutal des nouveaux propriétaires, des secours qu’ils trouvaient dans les forêts nationales dont ils emportaient le bois mort, que les industries à feu tomberaient sous la tutelle de ces compagnies monopoleuses, détentrices du bois sans lequel les forges, les verreries ne pouvaient produire. Et dans la véhémence de leur colère, ils allèrent jusqu’à insinuer que ces compagnies avaient acheté les législateurs assez coupables pour proposer un pareil attentat contre la propriété nationale, le droit des pauvres et l’intérêt de l’industrie. Qui sait même, ajoutaient-ils, si les ennemis de la patrie, si les étrangers acharnés à la perdre, comme les aristocrates anglais, n’achèteront pas les forêts de la France trahie ?


Billet de confiance de 30 deniers de la municipalité de Cordes (Tarn).
(Extrait d’un opuscule de M. Portal, archiviste du Tarn, et avec son autorisation).


« Au milieu des massifs de forêts, dit Vosgien, député du département des Vosges, se trouvent, dans les Vosges, des métairies, espèce unique de propriété pour ce pays, et où se nourrissent des troupeaux plus ou moins nombreux, suivant les ressources des pâturages rassemblés près de chacune d’elles ; leurs produits alimentent les départements voisins et ne sont point inférieurs à ceux de la ci-devant Bretagne. Cependant la moindre négligence nouvelle dans la conservation des bois les forcerait à quitter leurs habitations, presque ruinées par la très vicieuse administration financière de l’ancien régime. Mais d’ailleurs la surveillance publique d’une propriété particulière les mettrait en vain à l’abri de ce danger si les pacages leur étaient ôtés, et cependant il serait impossible de concentrer dans la vente l’espérance d’une direction privée très soignée et la conservation des usages locaux, ni qu’il faudrait, pour obtenir la première,