Page:Jaurès - Histoire socialiste, II.djvu/570

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

L’armement universel, le suffrage universel, la souveraineté nationale sans contre-poids, l’abolition effective et presque complète de la féodalité, l’expropriation immense des nobles succédant à l’expropriation de l’Église, voilà les forces vives que la Législative léguait à la Convention. Mais à celle-ci est réservé le corps-à-corps avec le danger. Elle n’aura pas à préparer la guerre, mais à la soutenir. Elle n’aura pas à suspendre le roi, mais à le juger et à édifier un gouvernement nouveau.

L’élection des assemblées primaires était fixée au 26 août, l’élection des députés au 2 septembre. La Législative siégea jusqu’à ce que la Convention pût se réunir, c’est-à-dire jusqu’au 21 septembre : et dans ces dernières semaines de la Législative se produisent de grands et terribles événements : les massacres de septembre, la campagne des Ardennes. Mais il est visible que, dès le mois d’août, tous les événements politiques sont comme orientés vers la Convention prochaine. Les partis cherchent à les utiliser, à les diriger, soit pour déterminer en tel ou tel sens le choix du peuple, soit pour créer dans les nouveaux élus, avant même qu’ils se réunissent, tel ou tel état d’esprit. La tribune de la Législative n’est plus, très souvent, qu’une tribune électorale. Les luttes politiques d’août et septembre appartiennent donc plus à la vie prochaine de la Convention qu’à la vie mourante de la Législative. Elles sont le prologue du grand drame qui va s’ouvrir avec la Convention.


À défaut de Guesde, qui fut arrêté dans son travail, il y a deux ans, par une maladie de plusieurs mois, ce court prologue et ce grand drame, c’est moi qui vais les conter, jusqu’au 9 thermidor, où Gabriel Deville, dont le travail est achevé, prendra la suite du récit. Les hommes de bonne foi reconnaîtront, j’espère, en toute notre œuvre, indigne à coup sûr d’aussi grandes choses, un sérieux effort vers la vérité.

Et n’est-ce pas de vérité surtout que le prolétariat qui lutte a besoin ?

Jean Jaurès.