en échange des denrées nécessaires à la vie tout l’or extrait par eux. L’or extrait par le peuple consommateur c’est la valeur de son travail. Si cette valeur ne suffisait pas à lui procurer sa subsistance, si elle ne déterminait pas la valeur correspondante de ces subsistances, il y aurait une crise vitale et le peuple aurait le droit de se venger par l’extermination de ceux qui, en effet, l’exterminent par la faim.
C’est donc sur les ressources des consommateurs, non sur les prétentions des propriétaires et marchands, que doit être réglé le prix des denrées. Pour qu’une société dure, pour qu’elle soit possible, il faut qu’il y ait équivalence des travaux, équivalence des fonctions de la vie. Il faut, précisément, que le travail puisse payer l’entretien du travailleur. C’est cette équivalence que L’Ange veut assurer par une détermination des prix d’après les facultés de la nation. Ainsi les consommateurs, les prolétaires seront protégés contre une exploitation vraiment meurtrière, mais ainsi les propriétaires et les marchands seront protégés contre les crises des prix.
L’Ange propose un vaste système d’abonnement par lequel l’ensemble des consommateurs achètera à des conditions constantes l’ensemble de la récolte à l’ensemble des propriétaires et marchands. Et c’est pour faire fonctionner ce système d’abonnement et l’équivalence vitale dont il est l’expression, que L’Ange organise toutes les familles du pays en groupements à la fois autonomes et solidaires. Ainsi, ce n’est pas d’une fantaisie individuelle ou de l’esprit de système que naît la théorie de l’association. Elle procède de la crise des subsistances, se développant dans la crise révolutionnaire. Elle naît d’un besoin vital dans une société où la démocratie aborde au pouvoir. Ce sont des préoccupations toutes réalistes et c’est une vaste inquiétude collective qui donnent jour à ces formes du socialisme que plus tard, et par un jugement très sommaire, le marxisme qualifiera d’utopiques.
Cet abonnement collectif et universel, L’Ange ne veut pas l’imposer, il le propose. Et il compte, pour le faire accepter, d’abord sur l’évidente nécessité d’un arrangement sans lequel la nation entre dans les convulsions de la faim et de l’anarchie, et puis, sur les avantages éclatants que les vendeurs eux-mêmes retireront de l’organisation coopérative et rationnelle des échanges. Et par ce trait décisif, par le recours à la libre association universelle qui agira par la seule force attractive de ses bienfaits, le système de L’Ange annonce certainement et ébauche celui de Fourier et il se distingue du communisme de réglementation et de taxation légale vers lequel à ce moment la pensée de la France évoluait.
C’est un germe bien original et distinct qui éclôt, avec bien d’autres germes mais sans se confondre avec eux, du sol historique de la France révolutionnaire et qui ajoute à son incomparable richesse. « Vous seriez donc forcés de vendre à ce prix, et libres de vendre à moins. Mais sans civiliser votre liberté, (c’est-à-dire au fond sans la socialiser), sans y mettre la moindre