Page:Jaurès - Histoire socialiste, III.djvu/99

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le 6. « La section du Mail vient demander au Conseil l’oubli des listes des signataires des pétitions anticiviques et de regarder ces citoyens comme frères. Le Conseil général passe à l’ordre du jour motivé par le danger qu’il y a d’admettre parmi les patriotes des citoyens dont le civisme a été plus que douteux jusqu’au 10. » Mais, « la députation est admise aux honneurs de la séance », sa démarche ne lui est donc pas imputée à crime. Oui, un grand apaisement s’était fait à la Commune même. Elle avait besoin de fraternité, d’oubli, de douceur.

Et toute entière, comme pour rouvrir au peuple les voies glorieuses de la grande action, elle s’applique à la défense nationale. Elle appelle, dès le 3, tous les citoyens des départements à se joindre aux citoyens de Paris pour aller à la frontière. Elle révoque pour leur négligence les membres de son Comité militaire. Elle fait appel au libre dévouement, rejette les enrôlements forcés et le tirage au sort, et compte sur le civisme et l’audace guerrière de Paris. Du 3 au 22 septembre, elle autorise les sections à dresser l’état de toutes les armes qui se trouvent chez les arquebusiers, clinquailliers, et à en fixer le prix d’après l’examen des factures. Elle réserve le plus possible à la défense nationale la main-d’œuvre ouvrière sollicitée alors de tous côtés, et elle arrête « que les travaux des bâtiments seront suspendus quand le besoin l’exigera et que les ouvriers qui en seront retirés recevront la même paye pour les travaux du camp que pour ceux où ils étaient employés. Elle envoie à la fabrication des piques, les grilles de fer des églises supprimées, ainsi que le fer qui se trouve au Temple ; elle fait une loi à tous les citoyens de porter les vieilles ferrailles à l’Arsenal et aux Invalides où on en fait des gargousses. Elle s’entend avec les ministres pour la construction d’affûts de canon. Elle décide que les commissaires de section doivent se transporter « chez les épiciers et chez tous les marchands d’objets propres à la chasse pour recevoir d’eux une déclaration amicale de la quantité de poudre et de plomb qu’ils peuvent avoir dans leurs magasins ». Elle adresse aux femmes de Paris, aux ouvrières, un appel plein de grandeur  : Citoyennes, le Conseil général de la Commune ne croit pas devoir laisser votre patriotisme dans l’oisiveté ; vos mains ne dédaigneront pas de concourir avec les citoyens au salut de la commune patrie. Des tentes sont nécessaires pour le camp sur Paris ; ces tentes ne sont pas encore faites ; le temps presse ; vous refuserez-vous à hâter la sûreté de la capitale ? C’est aux citoyens qu’il est réservé de vous défendre ; c’est à vous que nous réservons le glorieux avantage d’y participer ; hâtez-vous de vous rendre dans nos églises ; allez-y travailler aux effets de campement ; c’est un moyen de servir efficacement la patrie, d’anoblir le travail de vos mains et de contribuer avec nous au salut public. »

Elle concentre à la Maison Commune tous les fusils de calibre trouvés dans les visites domiciliaires ; elle enlève des églises les cercueils de plomb qui, fondus, feront des balles ; elle distribue aux sections, pour qu’elles fabri-