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Page:Jaurès - Histoire socialiste, IV.djvu/172

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rées, suite inévitable de la dépréciation des assignats et des manœuvres (réelles ou présumées) des accapareurs, rend la vie plus difficile. C’est à cela qu’il faut parer, et tout de suite.

Les groupements révolutionnaires ont un programme très pressant, et, en quelques points, très précis. Ils demandent qu’il soit mis un terme à la dépréciation des assignats et à l’agiotage sur les moyens d’échange par la prohibition de la monnaie de métal, et que les denrées soient taxées par une loi générale du maximum. Le 3 février, c’est la question de la monnaie que posent devant la Convention les délégués des 48 sections de Paris, du Conseil général et des défenseurs réunis des 84 départements :

« Citoyens, nous venons encore une fois réveiller votre attention sur le décret de l’Assemblée constituante qui déclare l’argent monnayé marchandise. Cette mesure anticivique, qui enfanta l’agiotage et la friponnerie, entrait parfaitement dans les calculs des ennemis de la chose publique.

« Ce décret est le principal moteur des machinations que les liberticides emploient pour renverser l’édifice sacré de nos droits.

« À cette époque une partie de l’Assemblée nationale avait juré notre perte en ouvrant une carrière à l’agiotage et à l’accaparement des denrées de première nécessité ; le commerce des assignats, avec l’argent dont l’intérêt devient toujours plus fort, est destructeur des principes de la République, et affaiblit, par conséquent, la confiance des citoyens ; aussi voyons-nous avec douleur que ce papier monnayé, quoique ayant une hypothèque certaine sur les biens nationaux, sera bientôt réduit à un état de nullité par le décroissement qu’il prend dans l’échange.

« … C’est de ce décret immoral que naquirent les maux dont nous sommes à présent affligés, et qui déchirent le sein de notre corps social ; ils pèsent sur la classe la moins aisée du peuple, qui, pour subvenir à ses besoins, n’a que le signe qu’on cherche à lui discréditer et auquel la malveillance est parvenue à attirer une défaveur dont l’effet a porté le prix des subsistances à un si haut degré.

« L’orage gronde au loin, il est prêt à éclater sur nos têtes ; du courage ! législateurs, du courage ! Nous sommes debout ; parlez, et les tyrans rentreront dans le néant.

« … Frappez sans pitié ces êtres indignes et méprisables qui se jouent avec autant d’audace que d’impudence de la fortune publique ; abattez-les, vous préviendrez des malheurs qui ne tarderaient pas à arriver. Abrogez cette loi, fruit de l’incapacité ou de l’impéritie, rendez un décret répressif ; prononcez la peine de mort contre tous ceux qui, en échangeant leurs pièces d’or d’argent, de cuivre, contre des assignats nationaux donneraient une valeur inférieure à celle qui leur est donnée par la loi.

« Les citoyens qui nous députent vers vous, attendent de votre sagesse