Page:Jaurès - Histoire socialiste, IV.djvu/377

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suffisent à les animer d’un mouvement héroïque ! Leur faux évêque d’Agra leur dit qu’ils traverseraient indemnes le feu de l’ennemi, et les voilà qui se jettent presque sans armes sur les patriotes puissamment armés. Les curés leur montrent trois vieillards auxquels pendant trois jours on a serré le cou avec un fil : c’est la trace du couperet de la guillotine, Dieu a recollé leur tête sur les épaules de ces braves gens, et voici les paysans de Vendée qui insultent à la mort.


Fusil vendéen.
(Photographie prise chez le citoyen Léon Birot, à Parthenay.)


Non vraiment, ces simagrées et ces mensonges ne peuvent prévaloir contre la force et la vérité de la Révolution, et s’il n’y a d’abord que tâtonnements ou débâcles, si Marcé est écrasé à Pont-Charrault et doit se replier en toute hâte, si Quétineau évacue précipitamment Bressuire, livre Thouars et se livre lui-même avec son armée, c’est parce que l’ombre de la trahison, après avoir couvert les vastes plaines uniformes de la Belgique, couvre les champs vallonnés et morcelés de l’Ouest. Quétineau ne fut-il pas l’ami, le lieutenant de Dumouriez ?

En vérité, les généraux ne trahissaient pas. Mais eux-mêmes ils étaient troublés, déconcertés par cette guerre toute nouvelle et qui ne ressemblait à rien de ce qu’ils avaient vu jusque-là. Ils s’attendaient à dissiper sans effort des bandes errantes de paysans armés de bâtons et de fourches, et voici que les haies se hérissaient de fusils meurtriers, qui visaient lentement et sûrement, voici que les paysans, le plus souvent dispersés, se rassemblaient sou-