Page:Jaurès - Histoire socialiste, IV.djvu/431

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offre à la patrie un bataillon au delà du contingent, Jean-Bon Saint-André témoigne du civisme du département du Lot :

« L’esprit qui règne dans le département du Lot, le civisme et la fermeté de l’administration du département, l’ardeur des citoyens, et surtout de la classe laborieuse, mettent ce département au niveau de ceux qui ont le mieux mérité de la patrie. »

Garrau au nom des représentants dans la Gironde et le Lot-et-Garonne, donne sur l’état d’esprit du Midi des renseignements assez inquiétants au Comité de salut public.

Agen, le 16 mai :

« Citoyens nos collègues, dans les circonstances critiques où nous nous trouvons, les vrais amis du peuple redoutent moins les efforts des despotes coalisés au dehors et des brigands réunis dans l’intérieur, que les manœuvres secrètes des intrigants et des fédéralistes. Les pièces que nous vous envoyons (ce sont des lettres de Vergniaud à ses amis de Bordeaux) sont bien propres à ouvrir les yeux de la Convention nationale sur cette espèce d’hommes d’autant plus dangereux qu’ils ont eu l’art de conquérir une sorte de popularité en pervertissant l’opinion publique. Le nombre de leurs sectaires est assez considérable dans quelques-uns des départements méridionaux et surtout dans les villes maritimes. Ils comptent pour eux une partie du peuple qu’ils ont égarée, et la classe entière des modérés, des feuillants, des égoïstes, des agioteurs, des fripons et des ambitieux ; de sorte qu’il n’est pas rare d’entendre dire, même publiquement, que puisque Paris veut dominer, il faut s’en séparer et former des États particuliers. De là, la difficulté de procurer des armes aux recrues qui se rendent aux frontières. Personne ne veut s’en dessaisir ; les délégués de la Convention nationale, qui les réclament au nom de la loi, sont outragés, menacés, traités de maratistes et de désorganisateurs. De là les défiances et les soupçons, les violences et les voies de fait, cet esprit de crainte et d’incertitude qui ralentit le courage, attiédit le zèle et comprime l’élan du patriotisme vers la liberté. De là, les débats les plus scandaleux, les divisions les plus affligeantes, les injures les plus vives contre les sociétés populaires, les sections d’une même ville, d’un même département. Chacun tient à tel ou tel parti, et la guerre civile n’est pas loin d’éclater avec fureur, si la Convention nationale, qui doit enfin étouffer toutes ces haines, ne prend les mesures les plus promptes pour les prévenir.

« Mais, citoyens, ce qui rend ce nouveau danger plus réel, plus imminent, c’est cette foule de libelles qui circulent chaque jour dans toutes les parties de la République. Des folliculaires sans pudeur, à qui l’or de la nation a été traîtreusement prodigué pendant six mois, continuent à vomir leur poison. Ce n’est pas tant contre vous, membres du Comité de salut public, dont ils ne cessent cependant de calomnier les intentions parce que vous faites aller la machine, que contre les commissaires de la Convention nationale, en-