sonne, car il n’y a point de pont de communication entre les planètes. (Rires).
« Ducos. — Je demande la réunion de la lune à la terre.
« Anacharsis Clootz. — Oui, la république du genre humain n’aura jamais de guerre avec personne, car il n’y a point de pont de communication entre la terre et les planètes (Nouveaux rires).
« Ducos. — Rappelez à l’ordre ce fédéraliste. (Rires.)
« Anacharsis Clootz. — Rome et Albe, Gênes et Pise, Bologne et Modène, Florence et Sienne, Venise et Trieste, Marseille et Nice, Metz et Nancy, Amsterdam et Anvers, se portaient une haine dont les historiens et les poètes nous ont transmis les relations lamentables. J’ai observé dans mes longs voyages, que chaque ville donne des sobriquets odieux ou ridicules aux villes voisines ; cet acharnement se fait aussi remarquer dans les campagnes ; et si vous voyez deux ou trois personnes assises devant la porte de leur maison, vous pouvez parier que la conversation n’est pas au profit du voisin. Voulons-nous rétablir la paix sur notre continent ? Faisons pour l’Europe ce que nous avons fait pour la France. Éclairons les hommes, délivrons-les de leurs erreurs ; et la haine naturelle entre voisins se changera en amour pour la loi commune qui, toujours impassible, ne fléchira pas sous la fougue des passions locales… Consultez tous les aristocrates de l’univers ; consultez les marchands privilégiés ; consultez les pirates et les contrebandiers ; consultez les transfuges criminels ; consultez les ambitieux patelins qui veulent multiplier les fonctions pour jouer un rôle avec le manteau d’un bourgmestre, avec les cartons d’un secrétaire d’État, avec le diplôme d’un ambassadeur, avec l’épée d’un général ; consultez les hommes qui méconnaissent les intérêts du peuple, ils vous détourneront du nivellement départemental ; ils vous conseilleront le pernicieux système du poly-républicanisme. Un département n’est pas sous la dépendance d’un autre département, mais une petite république sera plus ou moins sous la protection d’une grande république ; or, voilà un germe d’aristocratie dont les développements coûteront cher aux protecteurs et aux protégés.
« Tout se nivelle, tout se simplifie, toutes les barrières tombent, et l’immense attirail qui gêne l’action du gouvernement disparaît avec les fédérations nationales. Supposons un instant que la France fût une île inconnue au reste du monde ; son gouvernement délivré des inquiétudes vicinales, serait d’une simplicité admirable. La législature deviendrait moins nombreuse, et le Comité exécutif aurait des vacances. Eh ! bien, le globe que nous habitons est une île médiocre qui flotte autour du soleil. Calculez d’avance le bonheur dont jouiront les citoyens lorsque l’avarice du négoce et les jalousies du voisinage seront contenues par la loi universelle, lorsque les ambitions inciviques seront éclipsées par la majesté du genre humain…
« Oui, citoyens, l’univers sera un jour aussi jaloux de l’unité du genre humain que vous l’êtes maintenant de l’unité de la France.