jour, Marat ayant dit dans sa feuille (par un lapsus) : « Drouet, ce fourbe à trente-six carats », Drouet s’empressa de demander une rectification et un certificat de civisme !
Tous ces récits de Dumouriez ne prouvent qu’une chose, c’est qu’il n’avait pas encore, en janvier, pris un parti très net et qu’il cherchait à s’assurer en tout sens. Marat croit aussi (no du 12 janvier), que Westermann « cet intrigant qui s’introduit partout pour capter les esprits en faveur de Dumouriez son patron » était allé chez Santerre, sachant l’y rencontrer, « pour le tâter et savoir ce qu’il pourrait tirer de lui ». Mais on ne supposera pas que Dumouriez se soit risqué à plaider pour Louis XVI auprès de Marat. Il ne dit pas un mot des visites qu’il dut faire certainement au duc d’Orléans. Comment est-il possible de croire qu’ayant à son armée le fils de Philippe-Égalité il ne soit pas allé, sous ce prétexte très avouable, s’entretenir avec lui ? D’ailleurs, la maison d’Orléans devait tenir dès lors une grande place dans les combinaisons d’avenir de Dumouriez, et s’il se tait complètement là-dessus, c’est que voulant démontrer son zèle pour Louis XVI, il ne pouvait guère raconter ses démarches auprès de celui qui allait voter la mort de Louis XVI et qui ne pouvait arriver au trône ou y porter sa famille que par la mort de Louis. Dumouriez cherche donc visiblement à créer une impression fausse quand il donne le salut du roi comme objet principal de son séjour à Paris.
Ce qu’il dit de ses conférences avec les chefs Jacobins est curieux.
« Les Jacobins avaient détaché différents émissaires pour engager le général à paraître à leurs séances ; Anacharsis Clootz était venu plusieurs fois à la charge, et le général avait toujours éludé, en s’excusant sur ce qu’il ne pouvait pas paraître aux Jacobins avant d’avoir présenté ses hommages à la Convention. Le docteur Seypher, qui depuis est devenu un des généraux de l’anarchie, avait fait pareillement de vains efforts, ainsi que Proly, intriguant de Bruxelles, qui avait voulu, au moins, arranger une conférence avec un nommé Desfieux, fameux Jacobin, un des plus actifs voyageurs de la secte, qui arrivait de Bordeaux où il avait trouvé moyen de discréditer les membres de la Gironde, en excitant la populace de cette grande ville contre les honnêtes gens. Un nommé Jean Bon Saint-André, membre de la Convention, furieux Jacobin, quoiqu’avec la réputation d’honnête homme, pénétré d’estime pour le général, sans le connaître personnellement, insistait sur cette conférence, et voulait y assister. Le général ne voulait pas être conduit à ce rendez-vous par l’aventurier Proly, qu’il méprisait. Cependant, toute réflexion faite, il s’y décida ; le jour pris, le général se trouva avoir la fièvre et être obligé de rester au lit pour une sueur violente. Comme il ne voulait pas manquer de parole à Desfieux et à Saint-André qu’il ne connaissait pas du tout, il arrangea un autre rendez-vous avec eux chez Bonne-Carrère, ci-devant directeur des affaires étrangères, qui était fort lié avec eux.
« Là se passa l’entrevue. Desfieux parut au général une bête brute, un