Page:Jaurès - Histoire socialiste, IX.djvu/188

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une Commission administrative chargée de préparer un autre projet. Le procédé (non sans raison) parut vif à l’Assemblée, qui protesta en nommant de son côté une seconde Commission où figuraient Carnot, Vaulabelle, Edgar Quinet, Barthélemy-Saint-Hilaire et dont Jules Simon fut le rapporteur. Elle se bornait, pour l’enseignement primaire, à reprendre les dispositions du projet retiré. Pour l’enseignement secondaire et supérieur, elle se régla sur la double prescription adoptée dans la Constitution : Liberté de l’enseignement et surveillance de l’État — Point de liberté absolue ! « Car c’est un moyen assuré pour toute corporation puissante, qui voudra faire servir l’éducation à sa fortune, d’écraser toute concurrence et de créer, au nom de la liberté, le plus odieux des monopoles. » Mais, comme obstacle à l’arbitraire du ministre, on instituait auprès de lui un Conseil divisé en trois sections : la première, purement universitaire, et composée de douze membres nommés par lui sur une double liste de candidats, s’occuperait uniquement de l’enseignement public ; la seconde, appelée section de perfectionnement, comprendrait, en sus des membres de la première, des savants et des industriels qui discuteraient les améliorations possibles des programmes ; la troisième, chargée de toutes les affaires relatives à l’enseignement privé, contiendrait toujours les douze membres de la section de l’enseignement public, mais en outre douze membres de l’enseignement libre choisis par le ministre, et avec eux l’archevêque de Paris, le président du Consistoire protestant et quatre hauts magistrats ou fonctionnaires. — Dans les établissements privés, le certificat de moralité cessait d’être exigible pour le directeur et pour les maîtres ; il était remplacé par une triple déclaration. Une seule cause d’exclusion était prévue ; l’indignité constatée par les tribunaux. Comme preuve de capacité suffisait le simple diplôme de bachelier ès-Lettres ou même un examen subi devant une commission désignée par la troisième section du Conseil. La surveillance restait aux mains des inspecteurs de l’État qui avaient, non pas à se prononcer sur la valeur des méthodes, ni sur le mérite des professeurs, ni sur le matériel scolaire, ni sur les matières enseignées, mais seulement à constater si les lois, la morale et l’hygiène étaient observées. L’État gardait la collation des grades ; mais on poussait l’effort d’impartialité jusqu’à rendre publiques les épreuves écrites aussi bien que les épreuves orales. Le projet abolissait enfin le certificat d’études exigé jusqu’alors des jeunes gens qui voulaient se présenter au baccalauréat. Quant à l’enseignement public, une série de mesures avaient pour but de supprimer le scandale des suppléances interminables, l’avancement obtenu par faveur ou protection, l’inégalité entre les professeurs des hautes classes et les régents des classes inférieures, l’insécurité dans la situation des maîtres répétiteurs.

A coup sûr, si les catholiques eussent poursuivi sincèrement la liberté d’enseignement et non un monopole déguisé, ils auraient dû être satisfaits