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mineuses ou autres », était, dit de Pradt, dans la proportion de trois et demi de labourage contre un (De l’état de la culture en France, t. Ier, p. 133).

D’après le même auteur, plus de la moitié de ces terres de labour était ensemencée non en froment, mais en seigle ou même en grains de qualité inférieure au seigle (Idem, p. 132) ; celui-ci était fréquemment mélangé au froment dans la même terre et le résultat de ce mélange était appelé, suivant sa proportion, blé ramé ou méteil (Dictionnaire universel de commerce, de Buisson, t. Ier, p. 298) ; de plus, les cultivateurs, on vient de le voir et tous les témoignages s’accordent sur ce point, avaient l’habitude de semer trop abondamment, espérant de la sorte récolter davantage. Dans le commerce (Idem, t. Ier, p. 630), on considérait qu’il fallait 235 kilos de blé pour produire le sac de farine de 159 kilos, ce qui donnait un rendement de 65 % ; le produit était, en fait, un peu moins faible et le rendement un peu plus élevé. Ainsi qu’aujourd’hui on obtenait, en moyenne, un kilo de pain par kilo de blé. Selon les Cours de l’École de Mars (chapitre supplémentaire), le pain de l’an II était « fait de farine de froment dont on a ôté 15 livres de son par quintal » de 100 livres.

Au moins « dans le sud, l’est et l’ouest », constatait à la Convention Penières, parlant au nom du comité d’agriculture dans la séance du 16 vendémiaire an III (7 octobre 1794), « on est encore assujetti aux antiques méthodes, les outils aratoires n’y ont été ni changés, ni perfectionnés ». Comme charrue, on se servait d’une façon générale, dans le Midi, de l’araire ou charrue simple et, dans le Nord, de la charrue de Brie, charrue à avant-train ; une expérience fut faite, à la fin de 1796, dans le Cher où l’araire était employé ; elle démontra la supériorité de la charrue de Brie (Feuille du cultivateur du 27 pluviôse an V-15 février 1797, t. VII, p. 70-72).

Dans le Cher comme dans le Midi, la charrue était tirée par les bœufs, dans le Nord par les chevaux. Pour séparer le grain de l’épi on avait recours au fléau, ou au foulage, ou à ces deux opérations combinées. On battait au fléau, soit aussitôt la moisson faite, soit en grange l’hiver, et c’était le cas pour les départements où le système d’agriculture était le moins vicieux. Les départements méridionaux faisaient fouler les gerbes par des chevaux ou des mules, c’est ce qui s’appelle dépiquer ; la paille et le grain sont par cette méthode salis et froissés. La Décade philosophique du 10 fructidor an III-27 août 1795 (t. VI, p. 396) qui m’a fourni ces détails, ajoutait qu’un batteur pouvait battre 90 gerbes de froment ou 108 d’avoine en 11 heures de travail, et qu’un cheval pouvait dépiquer par jour de 5 à 600 kilos de blé ; presque partout on nettoyait le grain en le jetant contre le vent avec une pelle de bois. La même revue (t. V) mentionnait, le 20 germinal an III (9 avril 1795), une machine à battre inventée par Cardinet à qui, disait-elle, on devait déjà une brouette à moissonner, et (t. XX), le 20 pluviôse an VII (8 février 1799), un épurateur inventé par Fouquet-Desroches et perfectionné par Molard ;