Page:Jaurès - Histoire socialiste, V.djvu/418

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ne relevaient pas de sa compétence et devaient être renvoyés devant les tribunaux criminels de leurs domiciles respectifs. Le Directoire, après un recours infructueux au tribunal de cassation, finit par se décider à faire un essai en ce sens, et cinq des prévenus originaires du département du Nord furent renvoyés devant le tribunal criminel de Douai d’abord, puis, à la suite de nombreux incidents de procédure et d’une nouvelle intervention du tribunal de cassation, devant le tribunal criminel du Pas-de-Calais. Celui-ci ayant jugé, le 26 prairial an V (14 juin 1797), qu’il lui appartenait de prononcer sur le sort de tous les prévenus, le commissaire du Directoire exécutif près de ce tribunal se pourvut en cassation. L’affaire en était là lorsque intervint la résolution du 30 messidor (18 juillet), votée par les Anciens et devenue loi le 15 thermidor (2 août), portant que les émigrés naufragés seraient « incessamment et sous le plus bref délai réembarqués et rendus en pays neutre ». S’appuyant sur cette loi, le tribunal de cassation déclara, le 11 fructidor (28 août), qu’il n’y avait pas lieu à délibérer sur le pourvoi. Les naufragés n’en devaient pas moins rester en prison. Après le 18 fructidor an V (4 septembre 1797), la question fut de savoir si l’article 19 de la loi du 19 fructidor, 5 septembre) ordonnant — voir plus loin — la déportation des émigrés détenus en France, s’appliquait aux naufragés de Calais. Le Directoire consulta à diverses reprises le Corps législatif ; le Conseil des Cinq-Cents, à son tour, réclama les pièces dont « la plupart se trouvèrent égarées et détournées par des intéressés », fut-il dit à la séance du 18 nivôse an VII (7 janvier 1799). Finalement, le 12 floréal an VII (1er mai 1799), les Cinq-Cents votaient une résolution abrogeant la loi du 15 thermidor an V (2 août 1797) et réclamant contre certains des naufragés des mesures plus rigoureuses que celles de la loi du 19 fructidor an V (5 septembre 1797). Mais, le 11 fructidor an VII (28 août 1799), le Conseil des Anciens rejetait cette résolution et semblait d’avis que c’était la loi du 19 fructidor qui était applicable d’une façon générale. Les naufragés de Calais ne devaient être relâchés que par Bonaparte au début de 1800.

Enfin, revenant à l’œuvre entreprise par les réactionnaires des nouveaux Conseils, le 27 messidor (15 juillet), les Cinq-Cents votaient une résolution rapportant toutes les dispositions légales qui prononçaient la peine de la déportation ou de la réclusion contre les prêtres réfractaires et assimilaient les prêtres déportés aux émigrés : tous pouvaient rentrer dans leurs droits de citoyens français. Cette résolution devenait loi le 7 fructidor (24 août) par l’approbation du Conseil des Anciens.

Il devait y avoir, en faveur des émigrés ou de leurs parents, d’autres projets que la journée du 18 fructidor (4 septembre) empêcha d’aboutir : par exemple, le 23 thermidor (10 août), une proposition, sur le rapport de Pavie, qui, ajournée ce jour-là par le Conseil des Cinq-Cents, ne reparut pas à son ordre du jour et ne fut donc pas votée par lui, contrairement à ce que dit Chassin