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de l’ordre religieux et militaire des chevaliers de Saint-Jean de Jérusalem, habituellement désignés sous le nom de chevaliers de Malte. L’importance de l’île dans le bassin de la Méditerranée avait, pendant son séjour en Italie, attiré l’attention de Bonaparte qui, depuis lors, rêvait de s’en rendre maître et s’était ménagé certaines intelligences dans la place. Les troupes descendirent le 22 (10 juin) à terre et parvinrent rapidement devant La Valette, capitale de l’île ; le 24 (12 juin), les représentants de l’ordre capitulaient et transféraient à la République la souveraineté sur les îles de Malte et de Gozzo. Laissant à Malte le général Vaubois avec une petite garnison, Bonaparte repartit le 1er messidor (19 juin). Le 13 messidor an VI (1er juillet 1798), dans la nuit, une partie de l’armée française débarqua près d’Alexandrie dont, le

Hôtel de Sens à Paris.
(D’après une estampe du Musée Carnavalet.)


lendemain, les habitants se soumirent après quelques velléités de résistance ; le soir même, Bonaparte adressait aux Égyptiens une longue proclamation publiée en arabe, où éclatent tout son charlatanisme et toute sa fourberie. Sous la souveraineté nominale de la Turquie, l’Égypte appartenait en fait à la caste militaire des Mameluks. C’était un corps de cavalerie se recrutant surtout au moyen d’esclaves achetés en particulier dans la Turquie d’Asie ; ils étaient environ 8.000, sous les ordres d’une vingtaine de beys, dont les deux principaux étaient à notre époque Mourad et Ibrahim. Bonaparte prétendait, sans porter préjudice à la puissance du sultan, arracher l’Égypte à la tyrannie des beys ; il disait : « nous sommes amis des vrais musulmans », et ajoutait : « gloire au sultan ! gloire à l’armée française son amie ! » Mais si les Coptes et les fellahs, descendants les uns et les autres de la race indigène, — les seconds devenus musulmans s’étant, il est vrai, plus modifiés par les croisements que les premiers restés chrétiens, — et les Arabes, descendants