Page:Jaurès - Histoire socialiste, VI.djvu/332

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avait été entendu qu’on forcerait le Danemark à adhérer au blocus continental. Mais, quelques jours après, une puissante escadre, commandée par l’amiral Gambier et transportant les troupes britanniques sous les ordres du général Cathcard, franchit le détroit du Sund et vint jeter l’ancre dans la baie d’Elseneur Sans la moindre déclaration préalable d’hostilité, le prince régent, alors en résidence à Kiel, fut sommé de livrer sa flotte et la forteresse de Kronenbourg. Le prince régent ne put que protester contre une telle violation du droit des gens et refuser d’entrer en pourparlers : aussitôt l’armée anglaise débarque, enveloppe Copenhague par le nord et par le sud et dresse ses batteries. Le 1er septembre, le bombardement commença et dura cinq jours.

Plus de 2 000 habitants périrent, plusieurs rues furent entièrement brûlées et la ville, à moitié détruite, capitula le 7 septembre. Les Anglais y pénétrèrent aussitôt, se livrant à un scandaleux pillage, enlevant de l’arsenal tout ce qui était transportable, saccageant le reste, puis se retirèrent assez brusquement, emmenant avec eux la flotte danoise composée de 16 vaisseaux de guerre et d’un grand nombre de petits bâtiments.

En présence d’un si monstrueux acte de piraterie, le prince régent n’hésita pas à se faire l’allié de Napoléon et à collaborer activement au blocus continental : ce fut d’ailleurs la ruine commerciale du petit royaume, entraînant bientôt la ruine financière de l’État et la banqueroute.

Au coup de main sur le Danemark, Napoléon avait d’ailleurs riposté dès les premières semaines par une vigoureuse action contre la Suède. Le roi s’enfuit honteusement au premier mouvement de nos troupes et abandonna Strassund, à la merci du maréchal Brune qui y entra le 20 août 1807 ; quelques jours après, le 3 septembre, notre armée s’empara de l’île de Rugen où le roi s’était réfugié.

Là ne s’arrêtaient pas les effets immédiats du blocus continental.

En Italie, Napoléon s’empresse de le faire prévaloir contre toutes les mauvaises volontés et deux États récalcitrants ne tardent pas à subir le poids de sa colère : la Toscane et les États pontificaux.

À Livourne, en Toscane, les Anglais avaient installé un entrepôt de marchandises : le général Miollis reçut l’ordre d’investir la ville sans plus tarder. Rome était pour les Anglais le centre de leur diplomatie européenne : le pape fut mis en demeure d’adhérer au blocus continental, d’admettre vingt-quatre cardinaux français au sacré collège et de fermer ses ports et, comme Pie vii proclamait sa volonté de rester neutre, le général Lemarrois le 28 août 1807, prit, au nom de l’empereur, possession des provinces d’Ancône, ne Macerata, de Fermo et d’Urbin : le général Miollis, quelques mois après, entrait à Rome (février 1808.)

Si Rome était le centre de la diplomatie anglaise, Lisbonne était un des plus importante entrepôts du commerce britannique ; il fallait donc frapper