Page:Jaurès - Histoire socialiste, VI.djvu/390

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Mais, le lendemain, s’engage la bataille de Wagram entre les deux armées à peu près égales en nombre : c’est trois cent mille hommes qui se rencontrent en un choc formidable.

Dès quatre heures du matin, l’archiduc Charles prend l’offensive ; mais il se heurte aux intrépides colonnes du maréchal Davoust qui, non content de repousser les assaillants, les met en déroute et les poursuit jusqu’à Neusiedel. Ainsi notre aile droite remportait un premier avantage.

L’aile gauche, au contraire, était singulièrement menacée par un mouvement tournant : seules la présence d’esprit de Napoléon et sa promptitude dans la décision purent sauver la situation. Il ordonna une véritable charge d’artillerie, qui, conduite par Macdonald, exécutée par Drouot et Lauriston, causa une effroyable panique dans les rangs autrichiens, il n’y eut plus alors qu’à achever la victoire des deux ailes par une marche vigoureuse du centre. Oudinot et Masséna s’ébranlèrent donc à leur tour et les positions de Wagram et d’Essling furent enlevées en un élan terrible. De tous côtés les Autrichiens étaient débordés et ne pouvaient plus songer qu’à la retraite.

Mais quelle tuerie ! Plus de vingt-cinq mille cadavres, de part et d’autre, jonchaient le champ de bataille.

À Paris, on fut en liesse et les théâtres eurent des manifestations enthousiastes : les patriotes d’alors hurlaient des chants de triomphe où ne se mêlait aucun regret pour les victimes. Est-ce que les gémissements des blessés pouvaient, à pareille distance, troubler la joie des spectateurs ?

Cependant, Napoléon ne songeait point à s’endormir sur ses lauriers. À peine prit-il le temps de lever sur les provinces conquises une contribution de deux cents millions que l’on courut à la poursuite de l’ennemi. L’archiduc Charles fut rejoint en Bohème et, le 11 juillet, à Zuaim, se reconnaissant incapable de soutenir la bataille, demanda un armistice. Il fut signé le 12 juillet et les négociations commencèrent aussitôt, qui aboutirent au traité de Vienne (13-14 octobre 1809).

Par ce traité, l’Autriche cédait à la France toutes ses provinces illyriennes, divers territoires à la Saxe et à la Bavière, les cercles de Zamosc et la Galicie occidentale au grand-duché de Pologne, les deux cercles Solkiew et de Zloczow à la Russie. La Russie se trouvait ainsi payée sans avoir pourtant, malgré les traités, pris part à la campagne : elle n’était intervenue que pour forcer la main à François, hésitant à signer la paix.

Il fut stipulé de plus que le contingent de l’armée autrichienne ne pourrait s’élever au delà de deux cent cinquante mille hommes et que la cour d’Autriche aurait à payer une contribution de guerre de 85 millions, sans préjudice des acomptes perçus sur celle de 200 millions frappée au lendemain de Wagram.

À ne considérer que les apparences, la puissance napoléonienne était