Page:Jaurès - Histoire socialiste, VI.djvu/510

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Jamais l’imagination des femmes ne se laissa emporter à des excès d’un goût plus déplorable : un sentimentalisme aventureux et qui non semble tout à fait suranné imprègne quelques romans laissés par Mme Cottin et Mme de Genlis.

Xavier de Maistre, déjà célèbre, s’acquit d’autres admirateurs par des ouvrages nouveaux, et Charles Nodier, bien timide et peu doué, se signalait néanmoins à l’attention de ses contemporains par des œuvres consciencieuses empreintes d’un sentimentalisme facile et ennuyeux.

Beaux-Arts. — Peinture.

On s’étonne que les incessantes préoccupations belliqueuses de Napoléon lui aient laissé le loisir de songer à nos richesses esthétiques. Et cependant il n’est presque aucune de ses campagnes au cours de laquelle on ne puisse signaler des envois de chefs-d’œuvre enlevés aux musées étrangers. Le nombre des toiles dont les hasards de la guerre le rendirent maître dépasse les prévisions les plus audacieuses. Il suffit, pour s’en rendre compte, de citer quelques-uns des noms d’artistes réunis par lui dans les galeries du Louvre. Les œuvres importantes de Van Dyck, Titien, Pérugin, Raphaël, Guide, Véronèse, Corrège, Rembrandt, Ruysdaël, A. Sarte furent amenées en France par ses soins, et nous eûmes la chance de les y voir demeurer dans un instant où l’Europe, enfin victorieuse, paraissait décidée à ne plus laisser subsister un seul vestige d’une puissance qui l’avait plusieurs fois écrasée. Il y eut néanmoins, après, 1810, des tentatives nombreuses faites par les nations coalisées pour reprendre les richesses qui leur avaient appartenu. Plusieurs réussirent, et nos galeries furent dépossédées d’un certain nombre des plus belles toiles qu’elles contenaient.

Si la littérature, à part de très notoires exceptions, offre sous l’Empire assez peu de talents originaux et de personnalités soucieuses de leur complète indépendance intellectuelle, on n’en peut pas dire autant des beaux-arts. Un âge qui vit Géircault, les Vernet, Ingres, Gérard, et un peu plus tard Delacroix, a, semble-t-il, les plus grands titres à l’admiration générale. Il est vrai que là, encore, l’indépendance du labeur et la liberté de l’inspiration furent les premières garanties du talent de ces artistes. On ne peut s’exprimer de la même manière sur le compte de David, qui représente, au contraire, au cours de cette période artistique, tout ce que l’Empire a consacré de froid et d’artificiel, de pompeux et de sévère. La prédilection de l’empereur pour cet artiste s’explique fort naturellement. D’autre part, David joignait à son très réel métier de peintre des qualités utiles de souplesse, une componction et une docilité qui étaient de nature à lui attirer les grâces de l’autocrate. Celui-ci l’encouragea dès ses débuts, lui concéda une attention dont les