Pendant la fusillade, alors que les obus tombaient sur les quartiers qui constituent maintenant la Trinité, la population, sur les boulevards, échangeait à voix basse ses impressions.
Le matin du 30 mars, l’impératrice et le roi de Rome, sur la pression de Joseph et du conseil, en dépit de l’opposition calculée de Talleyrand, avaient quitté Paris. Leur carrosse, suivi d’innombrables voitures, avait amené hors de Paris, en Touraine, l’impératrice qui quittait sans une larme, sans un regret, un trône que la loi des diplomaties lui avait imposé. Le long convoi, le triste convoi de l’Empire, avait défilé sous le regard de quelques passants, et cette fuite d’une dynastie attestait l’inutilité de la défense. Joseph, il est vrai, restait, médiocre représentant de l’empereur, invisible et intolérable. Mais à qui n’avait pas su conserver Madrid et le trône d’Espagne, l’autorité manquait pour protéger Paris et le trône de Napoléon. Du reste, au mépris d’une promesse solennelle, lui aussi devait fuir… Cependant, il avait laissé à Marmont la latitude de capituler quand l’heure semblerait décisive.
Le duc de Raguse, dont la capacité militaire aurait répudié, si elle l’eût pu, la terrible tâche de défendre Paris, continuait le combat. Mais le cercle noir des uniformes enserrait de plus en plus la ville, l’étouffait, devenait son seul horizon. Rien que sous la pression physique de tant d’hommes, les combattants, peu à peu, reculaient. Les postes étaient intenables. Les barrières emportées et reprises, et emportées encore, ouvrirent au flot les rues de la ville. Maintenant on se battait de maison à maison, de porte à porte, et les fenêtres étaient des créneaux. Marmont, blessé, les habits en lambeaux, l’épée dans sa seule main valide, n’était plus que le chef dérisoire d’une armée fictive… Vers les quatre heures, il dépêcha vers l’ennemi des parlementaires. Si vive était la fusillade que le premier fut tué, les deux autres furent blessés. Labédoyère revint, ne pouvant se faire jour à travers la mitraille. Enfin, par la route où commandait le général Compan, et qui était plus protégée, un parlementaire se put montrer. Il parla, offrit une suspension d’armes. Le feu cessa vers les cinq heures du soir.
Était-ce là tout l’effort que pouvait tenter Paris ? N’avait-il pas des hommes et des munitions ? N’aurait-il pas dû être organisé en vue d’un siège que la plus élémentaire prudence devait prévoir ? Est-ce la trahison, est-ce l’inertie, est-ce l’anarchie, est-ce l’ignorance qui furent les complices de la défaite ? Napoléon, en tous cas, était le premier coupable. Coupable de n’avoir pas prévu, dès le mois de janvier 1814, que la coalition tendait vers Paris ; coupable de n’avoir pas armé la capitale ; coupable de n’avoir pas compris que la reddition de Paris, ce n’était pas seulement une défaite militaire, mais une catastrophe dynastique.
Il a prétendu, il est vrai, avoir laissé des ordres, et le témoignage du général Dejean, son aide de camp, par lui dépêché à Joseph en fuite et qu’il