seront-ils assez élevés pour exempter de soucis le peuple prolétaire et pour le faire croire aux bienfaits de l’Empire ? Voilà la préoccupation essentielle d’un gouvernement de pain à bon marché.
D’une manière générale, pendant toute la période du Second Empire, les salaires s’accrurent et notablement. Quelques corporations, parlaient bien d’une baisse des salaires : les gantiers, par exemple, victimes de l’emploi des femmes et de l’introduction du travail par spécialités, affirmaient que leur salaire moyen, de 4 francs en 1860, était descendu en 1862 à 3 fr. 50 et 3 fr. 25. De même, un certain nombre de délégués ouvriers parisiens à l’Exposition de Londres étaient d’avis que les salaires n’avaient pas augmenté. Mais c’étaient là des exceptions. Soit, en effet, que l’on compare les observations rassemblées à 20 ans de distance par les deux enquêteurs de l’Académie des sciences morales et politiques, par Villermé en 1840, par Louis Reybaud vers 1860, — soit que l’on rapproche les statistiques fournies au Ministère du Commerce par les maires de France en 1853 et en 1871, ou encore les statistiques de la Chambre de Commerce de Paris en 1847, en 1860 et en 1872, soit que l’on prenne, enfin, les résultats de la grande enquête parlementaire décidée en 1872 par l’Assemblée nationale sur les conditions du travail, on aboutira partout à ce même résultat : une augmentation notable pour l’ensemble des salaires, pendant le Second Empire.
Il ne nous est point possible de faire ici une étude détaillée et critique des chiffres dont nous disposons. Les camarades à qui il est arrivé de consulter ou seulement d’ouvrir les statistiques des salaires savent combien incomplètes étaient les données qu’ils trouvaient et à quelles difficultés d’interprétation ils se sont heurtés. Une étude scientifique du mouvement des salaires au XIXe siècle en France fait encore défaut. Contentons-nous donc d’indiquer ici quelques-uns des chiffres les plus caractéristiques et les plus sûrs.
Il y a tout d’abord quelques corporations où par suite de l’existence de prix de séries ou de certaines règles législatives, les salaires peuvent être exactement connus : par exemple les métiers du bâtiment et les mines.
Le tableau suivant que nous empruntons à l’enquête de l’Office du Travail sur les prix et les salaires (Tome IV, p. 273) donnera dès l’abord une idée suffisante de la progression des salaires pendant le Second Empire. Il concerne les ouvriers du bâtiment à Paris :
1842 | 1852 | 1862 | 1873 | |
— | — | — | — | |
Terrassier | 2,75 | 2,75 | 4 » | 4 » |
Maçon | 4,15 | 4,25 | 5,25 | 5,50 |
Garçon maçon | 2,45 | 2,60 | 3,35 | 3,50 |
Tailleur de pierre | 4,20 | 4,25 | 5,50 | 5,50 |
Charpentier | 4 » | 5 » | 6 » | 6 » |
Couvreur | 5 » | 5,75 | 6 » | 6,25 |
Menuisier | 3,25 | 3,25 | 4 » | 5 » |
Serrurier | 3,25 | 3,25 | 4 » | 5 » |