n’avait rien à attendre de l’Angleterre ; quant à l’Autriche, n’était-elle point l’ennemie héréditaire ?
Dès le début de 1863, il le déclarait donc à son ami Arese : « Tous mes efforts tendent à ce que vous obteniez la Vénétie ». Il le faisait entendre aussi dans le courant de l’année au roi italien lui-même, et un ministre se trouvait, M. Visconti Venosta, ancien patriote mazzinien, mais diplomate supérieur qui, au bout de quelques mois, allait traduire en traité la solution que l’Empereur proposait à l’Italie.
Le 15 septembre 1864, une convention était signée. L’Italie s’engageait à ne pas attaquer les possessions qui restaient encore au Saint-Siège ; la France promettait de retirer ses troupes, à mesure que le Saint-Siège aurait une armée de volontaires, mais dans un délai de deux ans. Un article secret indiquait que la capitale de l’Italie serait transférée à Florence. Ce transfert apparaissait comme une renonciation durable à Rome ; mais Florence aussi « offrait les meilleures conditions topographiques sur les lignes du Pô et des Apennins » ; Florence était, contre l’Autriche, la capitale stratégique. Que Napoléon III parvint donc bientôt à donner la Vénétie à l’Italie, et il pourrait se flatter d’avoir enfin résolu la question qui l’obsédait déjà depuis tant d’années.
Peu importaient, en somme, si l’on arrivait à ce résultat, les criailleries catholiques. En réponse à la Convention du 15 septembre, Pie IX, exaspéré, avait lancé l’encyclique Quanta Cura et le Syllabus (8 décembre 64). Ces documents sont célèbres dans l’histoire du monde moderne. Ne nous y attardons pas. Chacun en connaît le contenu : anathème à la philosophie, anathème à la science, anathème aux droits de la conscience, anathème aux principes les plus élémentaires du droit public. Le pontife romain déclarait, on le sait, « qu’il ne pouvait ni ne devait se réconcilier ni transiger avec le progrès, le libéralisme et la civilisation moderne ».
D’ailleurs, à l’heure même où il fut lancé, le Syllabus apparut surtout comme une manœuvre politique. Napoléon III l’accueillit sans philosophie. On eut de nouveau quelque temps la petite guerre religieuse : l’interdiction au nom de la loi de propager le Syllabus, la désobéissance des évêques, le lisant en chaire au risque de l’inoffensif « appel comme d’abus », et le pouvoir répondant comme naguère, en lâchant ses libéraux, en appelant le prince Napoléon à la vice-présidence du conseil privé, en laissant faire la belle et pacifique manifestation qui accompagna le cercueil de Proudhon, en janvier, ou en permettant à Duruy, l’ennemi de l’Église, de publier dans le Moniteur son rapport concluant à la gratuité et à l’obligation de l’enseignement primaire (février 65).
Mais il fallait agir vite ; il fallait en dérivant les passions italiennes vers l’Autriche, en procurant effectivement la Vénétie à l’Italie, montrer l’efficacité de la convention du 15 septembre. L’insupportable Thiers ne venait-il pas