Page:Jaurès - Histoire socialiste, X.djvu/405

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couronne civique ? écrivait-il joyeusement le 19 avril. S’il n’en faut avoir fondé que vingt, j’espère la gagner. Voici en attendant ce qu’il y a de fait : sections nombreuses fondées au Creusot, à Fourchambault, correspondances ouvertes avec des groupes démocratiques de Moulins, devers, Guérrgny, Cosne, Beaune, Dijon, Châlon, Tournus, Gueugnon, Torteron et Clamecy, et ce n’est qu’un début.

« L’idée de l’Internationale prend comme une traînée de poudre. Ces vieux déportés de décembre me serrent la main en pleurant, et ils se dévouent corps et âme à l’Internationale qui est pour eux une véritable révélation ». — « S’il était possible, avait-il écrit quelques jours plus tôt (le 7) que nous ayons, nous, Internationale, un voyageur en permanence, nous préparerions complètement le terrain à la révolution sociale ». Et il concluait le 22, après toute cette tournée : « Courage et bientôt l’Internationale embrassera tous les points de la France ; à notre prochain Congrès nous aurons des paysans ». (Troisième procès, p. 87).

À Paris enfin, les sections réorganisées achevaient de se fédérer (19 avril) et cherchaient les moyens d’établir des relations plus régulières avec le Conseil central de Londres. L’idée d’un comité chargé des rapports avec le Conseil pour toute la France se faisait jour et poussait, elle aussi, à une union plus étroite de toutes les forces.

En attendant, l’Internationale s’était jetée ardemment dans la bataille plébiscitaire. Dès le 11 avril, la branche française de Londres avait conseillé de déposer des bulletins blancs dans l’urne. Bientôt le comité parisien avait suivi son exemple. Les réunions anti-plébiscitaires avaient été multipliées. Le 24, la Marseillaise publiait le manifeste commun des sections parisiennes de l’Internationale et de la Chambre fédérale des sociétés ouvrières, manifeste adressé à tous les travailleurs français. « Il ne suffit pas, disaient les signataires, de répondre au plébiscite qu’on ose nous imposer par un vole purement négatif ; de préférer la Constitution de 70 à celle de 52, le gouvernement parlementaire au gouvernement personnel ; il faut qu’il sorte de l’urne la condamnation la plus absolue du régime monarchique, l’affirmation complète, radicale de la seule forme du gouvernement qui puisse faire droit à nos aspirations légitimes, la République démocratique et sociale ».

Dans toute la France, les procureurs généraux, priés par M. Ollivier de lui envoyer des rapports sur le mouvement plébiscitaire, lui signalaient partout, à tort ou à raison, des menées de l’Internationale. « Il était temps que l’autorité mît un terme à ces agissements révolutionnaires ».

Une instruction fut ouverte ; des perquisitions furent faites ; des arrestations opérées. La bourgeoisie conservatrice apprit avec satisfaction que l’Empire savait encore montrer de l’énergie contre les fauteurs de désordre social.

Par surcroit de chance, pour achever d’émouvoir les électeurs incertains et gobeurs, le gouvernement tenait son petit complot, Le 30 avril, il annonçait