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Page:Jaurès - Histoire socialiste, XII.djvu/72

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« Mais, tenez, ce n’est pas pour l’affaire du 31 octobre qu’on me poursuit ; il est clair qu’il s’agit d’autre chose et en voici la preuve : On vous a raconté que la série de mes crimes avait commencé en 1827, lors de la fusillade de la rue Saint-Denis, pour finir le 21 mai 1871 en faisant fusiller les otages ; je ne l’ai pas fait, mais je l’aurais fait, a-t-on dit, si j’avais été gouvernement… »

Le commissaire du gouvernement l’interrompant d’un : « Comment donc »… Blanqui poursuivit : « J’ajouterai que M. le Commissaire du gouvernement a requis contre moi, au nom des principes qui existaient avant notre première révolution. Pour lui, la révolution de 1789, celle de 1830, celle de 1848 sont autant de crimes. Eh bien ! je retiens ce fait qu’aujourd’hui, sous le gouvernement qui s’appelle la République, on me poursuit au nom des principes monarchiques. Je n’ajouterai rien sur l’affaire du 31 octobre, mon défenseur a tout dit là-dessus. »

Comme il était à prévoir, Blanqui fut condamné à la déportation dans une enceinte fortifiée.

Le rédacteur de la Gazette des Tribunaux ajoute : « Il a écouté sans la moindre émotion et regagne tranquillement sa prison où, nous dit-on, il s’occupe beaucoup plus d’astronomie et de mathématiques que de politique. »

Le jugement fut cassé pour ce motif que les débats, ainsi que Blanqui l’avait fait remarquer à propos de l’affaire de la Villette, avaient porté sur des faits non mentionnés sur l’ordre de mise en jugement et le 29 avril, devant le 6e conseil de guerre, l’affaire était de nouveau évoquée. La peine de la déportation lui confirmée, après que Blanqui eût répondu au président qui lui demandait s’il avait quelque chose à ajouter pour sa défense : « Non, monsieur le Président, je n’ai rien à ajouter à l’argumentation de mon avocat ; je n’ai qu’une chose à dire, c’est qu’il y a une convention militaire : que si elle n’est pas exécutée, c’est qu’il n’y a plus d’honneur, voilà tout. »

Et le vieux révolutionnaire devait rester prisonnier jusqu’au jour où, la propagande socialiste aidant, le suffrage universel allait forcer les portes de sa prison.

En même temps que le réveil républicain, manifesté par une série d’élections législatives complémentaires et d’élections cantonales, avait commencé, presque insensible, il est vrai, un renouveau socialiste. Certes, il était faible, timide, fort indécis quant aux doctrines. C’était plutôt, au début, comme un courant de sympathie pour le mouvement du 18 mars, d’indignation contre une répression cruelle et tenace ; d’attachement à la République, à une république vraiment républicaine, vraiment démocratique ; de haine contre l’Empire et la réaction royaliste menaçante ; de défiance envers les républicains du lendemain, ralliés suscitant de légitimes inquiétudes ; envers la majorité des républicains de la veille qui avaient escamoté la journée du 4 septembre et n’avaient voulu ou osé frapper les responsables de dix-huit années d’oppression clôturées si tragique-