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CHAPITRE V
Demain. — Offensive et défensive.


Si la guerre éclate demain entre la France et l’Allemagne, quelle en sera la forme ? L’Allemagne pratiquera certainement l’offensive. Je veux dire par là qu’elle envahira brusquement le territoire français et qu’elle cherchera à frapper d’emblée sur le gros des forces françaises à peine rassemblées un de ces coups formidables qui assomment l’adversaire ou le laissent au moins si étourdi, si chancelant qu’il ne peut, même dans la suite d’une lutte prolongée, retrouver la pleine énergie du combat et l’élan de la victoire. Que ce soit demain la méthode allemande, tout l'indique. C’est la doctrine tous les jours plus ferme et plus nette du grand état-major de Berlin. C’est l’offensive qu’il affirme pour chacune des opérations comme pour l’ensemble, pour la conduite de la bataille comme pour la conduite de la guerre, pour te qu’on appelle la tactique comme pour ce qu’on appelle la stratégie. En vain pour la bataille, Clausewitz et de Moltke lui-même font-ils ressortir la force de la défensive. Dans le troisième volume des études du grand état-major prussien qui a paru en 1901 : Le Succès dans la bataille ; comment on l'obtient, et que notre Revue militaire des armées étrangères a analysé et commenté en mai 1905, le grand état-major va jusqu’à rejeter en ce point l’autorité de Clausewitz et de de Moltke lui-même. Il est convaincu que si Clausewitz avait pu assister aux progrès réalisés par l’organisation et la technique au cours du xixe siècle, c’est-à-dire sans doute s’il avait pu voir fonctionner l’armée allemande dans la guerre,de 1870, il aurait abandonné ses préférences pour la défensive. Mais