Page:Jaurès - L'Armée nouvelle, 1915.djvu/63

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troupes de ligne, c'est-à-dire dans les unités de premiere ligne, des formations de réserves, quelles qu'elles fussent.

Cela est clair, la tendance est nette, l'exemple est saisissant, et si nous sommes voués à copier en effet servilement l'Allemagne impériale, si la défaite de la France a été telle que sa pensée en soit accablée et qu'elle soit tenue, ayant une autre organisation politique que l'Allemagne, à avoir la même conception de la guerre et la même organisation de l'armée, nous n'avons plus qu'à rejeter à l'arrière-plan nos réserves.

On le croirait vraiment, à lire cet article de la Revue militaire de l'étranger. L'officier qui l'a écrit est tout à la merci et à la suite du militarisme allemand. Il y a deux Allemagnes, l'Allemagne nationale et enthousiaste de 1812 et 1813, l'Allemagne hiérarchique et féodale d'aujourd'hui. La première, meurtrie, blessée par le despotisme napoléonien, s'est sauvée par une armée de landwehr, beaucoup plus semblable à une armée de milices qu'à une armée de caserne. Cela, tous les Allemands ne l'ont pas oublié. Un article des Jahrbücher le rappelait en 1901. Mais l'écrivain militaire français a l'air gêné par ce souvenir. Il se hâte de rappeler que d'après même les Jahrbücher, cette armée de réserve, qui affranchit l'Allemagne et brisa la puissance de Napoléon, a surtout reçu sa force des cadres de l'ancienne armée. Je ne sais, et c'est un procès d'histoire où il est en ce moment inutile d'entrer. Je me demande si ces vieux cadres qui de Valmy à Iéna se montrèrent si prodigieusement incapables et débiles, ont vraiment été l'élément vigoureux des armées de la délivrance nationale et si ceux qui avaient perdu la Prusse sont précisément ceux qui onts auvé l'Allemagne.

Mais il n'importe : car il nous suffit de retenir qu'ainsi encadrées, et que ce fût ou non par la vertu de ces cadres, ces réserves, moins exercées pourtant que ne le sont en ce moment les réserves françaises et allemandes, ont formé une armée de première ligne admirable. Et il est dommage,