Page:Jaurès - Les Preuves.djvu/29

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Ce calcul sera déjoué : il faudra bien qu’un jour, sous la poussée de la conscience publique, les gouvernants demandent au général Mercier et aux juges du Conseil de guerre : « Oui ou non, cet homme a-t-il été jugé sur des pièces ignorées de lui ? » Et la réponse n’est pas douteuse.



L’INTÉRÊT SOCIALISTE


Ce jour-là, nous aurons le droit de nous dresser, nous socialistes, contre tous les dirigeants qui depuis des années nous combattent au nom des principes de la Révolution française.

« Qu’avez-vous fait, leur crierons-nous, de la déclaration des Droits de l’Homme et de la liberté individuelle ? Vous en avez fait mépris ; vous avez livré tout cela à l’insolence du pouvoir militaire. Vous êtes les renégats de la Révolution bourgeoise. »

Oh ! je sais bien ! Et j’entends le sophisme de nos ennemis : « Quoi ! nous dit doucereusement la Libre Parole, ce sont des socialistes, des révolutionnaires qui se préoccupent de légalité ! »

Je n’ai qu’un mot à répondre. Il y a deux parts dans la légalité capitaliste et bourgeoise. Il y a tout un ensemble de lois destinées à protéger l’iniquité fondamentale de notre société ; il y a des lois qui consacrent le privilège de la propriété capitaliste, l’exploitation du salarié par le possédant. Ces lois, nous voulons les rompre, et même par la Révolution, s’il le faut, abolir la légalité capitaliste pour faire surgir un ordre nouveau. Mais à côté de ces lois de privilège et de rapine, faites par une classe et pour elle, il en est d’autres qui résument les pauvres progrès de l’humanité, les modestes garanties